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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
24 février 2012

Nul ne part à l’assaut du ciel s’il risque des fesses mouillées (Joe Krapov)

DDS 182 balançoire enneigée sous verreUn blanc caftan de neige a couvert le jardin,

Brisant dans son élan l’énergie écolière :

Pas de car, pas d’école et la maman, geôlière,

Doit supporter les cris de son petit gredin.

 


C’est Noël ! Il a hâte, la mauvaise graine,

D’aller geler son linge au frais de la glacière,

D’être roi des Lapons, d’emplir sa gibecière

De cristaux et de cabrioles dans l’arène.


 

- Mange tes céréales avant de t’en allerDDS 182 balançoire enneigée

Brûler tes calories, criailler comme un geai,

Sur cet écran trop blanc accomplir ton carnage ! ».


 

Pas, bonhomme, glissade au milieu des allées…

Seul trésor épargné par le petit sauvage :

La balançoire, encore un peu immaculée.

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22 février 2012

Elégie à Nina la licorne

120212 002- Ayez donc l'obligeance, ma petite reine, au sortir de votre baignoire, d'enfiler vos plus chauds lainages : bas épais, pull angora et, par-dessus, votre caban. Ce n'est pas le moment d'attraper une angine. Après la cène du matin – vous y absorberez moult céréales, bananes ou oranges, on a besoin de calories lorsque l'on a votre énergie, – vous irez chasser le garenne avec le barine Sergeï. La neige a recouvert encore l'arène de vos cabrioles. Vous tâcherez, mon ange, de rester bien droite, bien agencée sur vos cannes en jouant aux jeux de votre âge au grand air. Et remplissez bien la gibecière !

- Pourrai-je faire quelques âneries pour épater la galerie, Nina Stepanovna ?demanda la petite princesse.

- Pour aujourd'hui, oui, mais je vous en prie ne hurlez plus votre rengaine de l'araignée Gipsy qui monte à la gouttière, cela porte sur les nerfs de Sa Majesté la tsarine votre mère. Vous viendrez me retrouver sur les bancs de l'école à dix heures pour me réciter « La cigale et la fourmi ». N'oubliez pas votre abrégé de grammaire ancienne, nous reverrons quelques bricoles en grec.

La préceptrice confia l'enfant à Vassili et puis, comme bille en tête, elle fonça en droite ligne à travers les couloirs vers le recoin du palais d'hiver où elle avait sa chambre. Dans son vieux bagage elle empila tout son linge. Elle glissa entre une jupe noire et une gaine beige le collier de la tsarine qu'elle avait dérobé le matin même.

MIC 2012 02 20 vodkaElle avait décidé de fuir cette famille, ce régime à l'agonie et son pays lui-même. Bientôt, ici, en cette sombre année 1917, ce serait le carnage, des bannières d'un rouge sanglant chargeraient le ciel d'alibis idéologiques pour toutes sortes de crimes à venir. Ca allait se cogner, se corriger ferme. Une force mystérieuse lui en avait fait l'annonce sous forme de visions d'un futur peuplé d'enragés. Raspoutine lui-même, le seul homme qu'elle avait aimé, le seul qui se fut intéressé à elle en ces lieux, celui qui l'honorait en l'appelant « ma nièce » dans un coin du grenier la nuit à la lueur d'un cierge, sous un portrait poussiéreux et l'œil morne du général Koutouzov, le moine assassiné était revenu la relancer dans ses rêves, lui conseillant de se mettre à l'abri, de laisser ces nobles ânes dans leur ignorance du drame à venir, de s'établir à Bâle, Bari, Liège ou Nice.

Elle s'en allait, certes sans élégance, mais il lui fallait bien commettre ce larcin de tire-laine pour assurer ses arrières. Les gages qu'on lui donnait pour être la geôlière de ces quatre princesses et de ce prince de haute lignée, pour faire crisser la craie au tableau et faire des génies de ces cinq écoliers ignares autant qu'incorrigibles, ne lui permettaient certes pas de faire la noce et encore moins d'aller visiter les aborigènes de Bali ou les glaciers du Spitzberg. Et puis ce collier, c'était juste un peu d'arnica pour la récompenser d'avoir tant bossé pour si peu ici.

Elle serra la dernière lanière du sac de voyage, le souleva , prit la direction de la sortie du palais. Une fois dehors, elle traversa la cour et s'élança dans la ville fiévreuse comme un geai dans un ciel pur.
A l'énoncé du vendeur de journaux à la criée - « Le tsar abdique ! Le tsar abdique ! » -, une larme lui vint à l'œil puis coula vers sa narine. Et elle ne put se retenir cependant de sourire, gelée mais soulagée.
- Du balai les Romanov ! pensa-t-elle en prenant de nouveau son élan. Peu me chaut que vos quatre filles attrapent l'onglée ! De même, si vous avez chaud aux fesses cela me laisse de glace ! Le Titanic aussi a heurté l'iceberg ! L'océan engloutit tout ! Sauf celles et ceux qui savent nager !

MIC 2012 02 20 ice puddleQu'y pouvait-elle au fond ? Que pesait-elle face au grand souffle de l'histoire ? Juste le poids d'un peu de neige sur un siège de balançoire ! Armée de cette légèreté et de ces visions de l'avenir, elle marcherait sur la glace fine (« walking on thin ice », leçon 6, alinéa 3 du livre d'anglais) tant que patinerait l'histoire, indifférente à la tourmente, en quête d'une place ailleurs, à l'étranger toujours, en Suisse tout d'abord et puis plus tard, parce qu'il faudrait encore fuir en 1939, vers l' Amérique. Oui, elle marcherait sur la glace, comme tout un chacun, jusqu'à ce que quelque chose craque.

Tout ceci était naturel : quand toutes les voyantes sont au rouge, les oies blanches émigrent au chaud et la licorne s'en va boire une eau toujours plus cristalline.

19 février 2012

Le lac de Brennilis vu de Roc'h Bichourel

110723 A 077

18 février 2012

UNE AVENTURE DE SUPERMAN ??? par Joe Krapov et Joye

C'est vrai que je m'étais avancé masqué, mais les ficelles du masque étaient très grosses : déjà l'article s'intitulait « Petit moment d'Hil(d)arité » et je mentionnais en fin d'article que j'avais emprunté l'illustration à un journal concurrent. La rédac' chef, pas dupe, m'a fait appeler dans son bureau.

- Dis donc, Nick, déjà je m'en doutais quand j'ai vu le titre, mais il me semble que tu as utilisé la photo de notre concurrent pour ton conte des mille et une nuits. Je préfère ne pas marcher sur leur plates-bandes. J'espère que tu me pardonneras de ne pas publier ton texte ? Qu'est-ce que tu en penses ? Suis-je trop pointilleuse là-dessus ? Et puis j'ai lu et relu mais je ne vois vraiment pas le rapport avec la consigne de cette semaine : ni le mot, ni l'image, ni la citation ?

Je lui ai expliqué, un peu penaud, que cet article sur un texte retrouvé de la grande philosophe belge Annie Cordy avait bien été écrit uniquement à partir du mot « incommode » mais que oui, bon, elle pouvait sucrer le papier. J'arriverais bien à le placer ailleurs un jour ou l'autre ce texte d'une grande hauteur intellectuelle à propos d'une notoire pochade :

MIC 2012 02 13 Hilda 21
Y veulent bien mais n'peuvent point

C'est incommode d'être à la mode
Quand on est fan de purée
C'est pas facile d'être gracile
Quand on aime le cassoulet
Entre l'allure et les figures
Des top-models empaillées
La vie est dure quand on aime grailler

Refrain 1
Oui mais les princes n'aiment pas les minces et pour prendre leur pied
Tous ces sacs d'osses, quel sacerdoce, leur font un peu pitié
Sans rembourrage pas d'amarrage ils ne peuv'nt pas durer
Dieu me pardonne ils sont dans la purée.

2
Y veulent bien mais n'peuvent point

C'est pour la ville que ces débiles
Ont besoin d'une femme glaçon
C'est pour paraître, sembler connaître
Tous les couplets d'la chanson
Mai s'ils veulent faire une bonne affaire
Ils se radinent tous ici
Y'a d'la matière dans notre paradis

Refrain 2
Car nous les rondes on est girondes on sait comment y faire
Pour qu'il choisisse l'aile ou la cuisse et fasse bonne chère
Ca les chatouille ça les grassouille ils crient « olé ! olé ! »
Dieu me pardonne dans tous les cas soûlés. (1)

MIC 2012 02 13 Hilda 3Et puis, comme j'ai toujours l'esprit de l'escalier, je suis revenu une heure après et je lui ai dit :
- Je sais que tu vas te retrouver dans une situation incommode mais je tiens à te remercier des critiques que tu viens de faire sur ma contribution. Je les prends comme un encouragement à faire mieux la prochaine fois !
- ???
- Je sais bien qu'elles n'ont rien d'hostile mais figure-toi... Si je racontais tes hésitations, notre dialogue... Eh bien nous serions en plein dans l'illustration de ta citation de Marcel Duchamp : « Plus la critique est hostile, plus l'artiste devrait être encouragé ». Et l'illustration, je peux la changer. Alors ? On danse ?

Et puis j'ai pris du champ, comme Marcel, justement : je suis sorti sans attendre la réponse et je l'ai laissée réfléchir au truc. A l'heure actuelle je ne sais toujours pas si le papier sera publié demain mais j'en ai appris beaucoup sur moi-même. Finalement, j'ai beau ne pas bien l'aimer, je suis quand même un type dans le genre de Sarkozy : déjà on porte le même prénom et en plus, si on me fout dehors par la porte quand j'ai un masque de président, je reviens par la fenêtre avec un masque de candidat ! (2)

(1) Cela se chante bien entendu sur l'air de « La bonne du curé » d'Annie Cordy. 

(2) Les illustrations, tirées de la série de tableaux  "Hilda", sont signées de Duane Bryers.


 

17 février 2012

Le clochard céleste (Joe Krapov)

- Vous invitez le nombre d'ami(e)s que vous voulez à passer un dimanche midi chez vous. (Attention : plus on est de fous, plus on rit et plus il faut mettre de riz pour accompagner la viande et les fruits de mer de votre paella).

Ils ont obligation d'amener avec eux tout leur stock de cartes routières, même périmées, même dépenaillées. Michelin, IGN ou autres, toutes les cartes sont acceptées sauf la carte bleue : les jeux d'argent sont interdits chez vous comme chez moi. (De toute façon, comme on nous envoie toujours nous faire voir chez les Grecs, chez nous c'est comme chez eux : du fric il n'y en a plus, les banques ont tout piqué).

Après le repas, suivi de café et peut-être pousse-café en option on pousse obligatoirement tous les meubles et on s'assied en rond par terre sur le tapis indien comme dans la chanson « Germaine » de Renaud. (C'est la seule que je connaisse par cœur avec "La chasse aux papillons" de Brassens. Cette considération n'a rien à voir avec le reste mais il faut que vous appreniez à rester zen).

DDS181 haïku jardin zen

Chacun aura marqué ses cartes de ses initiales ou d'un signe distinctif en vue de les récupérer à l'issue du jeu. Elles peuvent toujours servir, même si, comme sur la nôtre, le contournement de Mûr-de-Bretagne par la quatre voies n'y est toujours pas mentionné. (Le Conseil général des Côtes d'Armor semble plus rapide dans l'avancée de ses travaux que les upgraders de chez Michelin. En fait la raison principale de ce bug tient surtout au fait que notre carte de Bretagne date de 1984. Ce serait bien qu'on en rachète une plus récente mais au moins, nous on ne s'engueule pas en voiture comme Jean-Pierre Berthoise et son épouse).

DDS181 haïku vélo

Le jeu commence. Le donneur mélange les cartes, les donne à couper à son voisin de gauche. (Mais non, Roger, pas avec des ciseaux ! Il est con lui, eh !). Puis il en distribue 5 à chacun.

Une main innocente (Kevin ? Jennyfer ? Nicolas ? Jules ? Léonie ? Théo ? Léa ? Aïcha ? Mini-Poune ?), en tout cas quelqu'une qui ne prend pas part au jeu aura choisi auparavant dans le dictionnaire ou sur Wikipédia une des 36000 communes françaises qu'il ou elle suppose inconnue de tous. Le nom de cette minuscule cité est donné en pâture aux participants. Chacun déplie alors ses cartes et cherche à localiser Saint-Georges-de-Gréhaignes ou Condat-sur-Ganaveix sur le territoire français en regardant dans son jeu.

DDS 181 haïku lampadaire

Même si on le trouve assez vite énervant, c'est un jeu qui rend très zen. Il a au moins un avantage. Pendant que vous faites ça personne ne vous rebat les oreilles avec un omniprésident qui va entrer en omnicampagne pour omnipromettre d'omnirompre avec tout ce qu'il n'a pas omnifait pour faire omnipire encore. (Superbe et généreux ce jour, j'ajoute la version de droite de cette phrase pour celles et ceux qui envisagent de le soutenir : "Pendant que vous faites ça personne ne vous rebat les oreilles avec une envie d'être président et de mener campagne pour promettre de rompre avec tout ce qu'a fait notre civilisation supérieure alors qu'on sait très bien qu'ils ou elles n'ont aucune expérience en matière de népotisme, de bling-bling ou de talonnettes, ces malhonnêtes !).

DDS 181 haïku chapelle

- Et qu'est-ce que gagne celui qui triomphe de l'épreuve ?
- Le droit d'inviter à son tour les autres pour un repas chez lui et une autre séance de satori à Paris
- C'est le nom du jeu ?
- Maintenant oui, au départ c'était satori à Mimizan-plage parce que j'en ai eu l'idée en rêve en me réveillant à 6 heures du matin le mardi 14 février 2012. « Satori à Paris », c'est en référence au bouquin de Kérouac. Il y raconte la recherche de ses origines bretonnes. C'est rigolo, parce que vous, je vous ai trouvé « Sur la route » !
- Vous savez, je connais un autre jeu. Je suis le seul à y jouer et c'est aussi un jeu d'exploration de l'espace mais en vrai.
- Vous cherchez quoi, vous, monsieur Augustin ?
- Je cherche un ascenseur qui me ramènerait chez moi.
- Ca n'a pas l'air de vous stresser plus que ça.
- Non, je suis très zen. C'est une épreuve qu'on m'impose, mais j'ai tout mon temps. J'ai l'éternité devant moi.
- Faites-voir la carte que vous avez tirée
- Nord Pas-de-Calais.
- Vous savez, ça me revient à l'instant. Quelque part du côté de Saint-Omer, il y a un ascenseur à péniches. Ce doit être à Arques, si je me souviens bien, là où Yvette Horner possède un magasin de perles de cristal.
- Promis j'irai. Merci encore de votre hospitalité. Vous pouvez me passer un livre pour la nuit ?
- Le livre des haïkus, de Kerouac ?
- Ce sera parfait !

DDS181 haïku lune 2

 P.S. Ce dialogue est bien entendu extrait de "Dieu s'ennuie le dimanche...", roman inachevé autant qu'inachevable.

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16 février 2012

Petit moment d'Hildarité ? par Joe Krapov

1

Y veulent bien mais n'peuvent point
C'est incommode d'être à la mode
Quand on est fan de purée
C'est pas facile d'être gracile
Quand on aime le cassoulet
Loin de l'allure et des figures
Des top-models empaillées
La vie est dure quand on aime grailler

Refrain 1

Oui mais les princes n'aiment pas les minces et pour prendre leur pied
Tous ces sacs d'osses, quel sacerdoce, leur font un peu pitié
Sans rembourrage pas d'amarrage ils ne peuv'nt pas durer
Dieu me pardonne ils sont dans la purée.


2

Y veulent bien mais n'peuvent point
C'est pour la ville que ces débiles
Ont besoin d'une femme glaçon
C'est pour paraître, sembler connaître
Tous les couplets d'la chanson
Mais s'ils veulent faire une bonne affaire
Ils se radinent tous ici
Y'a d'la matière dans notre paradis

Refrain 2

Car nous les rondes on est girondes on sait comment y faire
Pour qu'il choisisse l'aile ou la cuisse et fasse bonne chère
Ca les chatouille ça les grassouille ils crient « olé ! olé ! »
Dieu me pardonne dans tous les cas soûlés.
 

MIC 2012 02 13 Hilda

P.S. Cela se chante bien entendu sur l'air de
« La bonne du curé » d'Annie Cordy.

L'illustration, empruntée au site "Mil et une", s'intitule "Hilda"
et elle est signée Duane Bryers.

10 février 2012

Déguisé de toute éternité (Joe Krapov)

Si je farfouillais dans mes photos, je pourrais faire la liste de moult déguisements que j'enfilai naguère : un enfant mousquetaire, un musicien méchamment punk, un militaire (mais ça c'était pour de vrai !).

jpa mousquetaire

Je me suis costumé en pirate, en drapeau belge, en prisonnier du Village de Patrick McGoohan, en fou de jeu d'échecs, en bouffon, en clown, en poireau, en Oliver Hardy, en mineur de fond, en ténor des steppes russes, en Mary Poppins...

Mais le travestissement que je préfère, c'est quand je deviens Joe Krapov ! Coiffé comme Riquet à la Houppe, je monte sur une chaise, j'annonce que je vais m'envoler, et je ne décolle pas !

Cela dit, il faudra bien un jour que je me pose cette question à propos de mon amour du cinéma, des festivals de théâtre de rue, des blogs, des cafés-slam, du music-hall ancien et surtout des derniers carnavals que je photographie à tour de bras. Pourquoi donc suis-je attiré par ces endroits et ces situations dans lesquels on devient, on se montre un(e) autre que soi-même ?

Qu'est-ce qui ne me plaît pas dans la réalité, dans ma réalité ? Y aurait-t-il quelqu'un en moi qui serait prêt à déclarer des horreurs comme celle-ci : « Toutes les civilisations ne se valent pas ! Et par-dessus toutes les autres, il faut placer la civilisation Vénitienne à qui nous devons Vivaldi, Canaletto, Guardi, les gondoles à Venise de Sheila et Ringo, l'invention du ghetto, des lettres de dénonciation anonymes, du touriste pigeon et surtout celle du carnaval qui dure six mois » ?

Ou serais-je prêt, quitte à m'auto-fustiger, à chanter cette méchanceté des VRP ? 

On dirait que la réponse est « oui » ! Tant pis pour vous ! Bon carnaval quand même !
 

JPL 1976 militaire

9 février 2012

CECI N'EST PAS UN PIP ! par Joe Krapov

Pour Santoline d'après une idée de Joye

Pa Gritte et Ma Gritte
Ont une petite
- Une sacrée pépette ! -
Nommée Margareth,
Marguerite,
Mais on dit Grete.
 

MIC 2012 02 06 âneUn jour qu'ils partaient
En pèlerinage,
Avec leurs lainages
Parce qu'il caillait,
Ils croisèrent en route
Une drôle de troupe :
Démocrite portant ses tripes,
Hérodote revenant d' Saint-Trop,
Hippocrate allant à Trappes
Et l'âne des démocrates
A qui tous filaient des trempes
Parce qu'il avait des crampes,
Ahanait, n'avançait plus
Ne se secouait pas les puces.
 

MIC 2012 02 06 Pipe- Hannibal qui manque de peps ! »
Martelait Hérodote qui l'avait confondu avec un éléphant.
- Ane bâté ! Mule du pape ! »
Ajoutait Démocrite allant Daudet-linant.
- Ceci n'est pas une pipe !
Commentait Hippocrate,
J'en ferais le serment
Si je ne rêvais tant, ô soif,
D'un jus de pomme. »

Alors Grete lui tendit sa gourde.
Quand il l'ouvrit cela fit « pop ! »
Car c'était de la limonade.

- Tu vas en prendre pour ton grade
Si tu nous laisses encore en rade ! »
Décrétèrent les camarades
Rassasiés par l'eau gazeuse.

- Tu ne reverras plus ton God
D'ici à Nijni-Novgorod !
Si tu joues au gastéropode
On te confisquera ton Ipod !
Parce qu'enfin, vraiment, c'est raide
Qu'on doive appeler Grete à l'aide
Sous prétexte que c'est
L'âne doux qu' a bu l'eau
Et le veau qu'a bu l'air ! »

Ils burent une autre rasade
Puis les étranges philosophes
S'allongèrent dans les salades
Et s'endormirent en fin de strophe.
Ils s'assoupirent où le meilleur
Est, dans le cœur
(« Car l'étau de l'Etat
N'atteint pas
Les laitues de l'été qui patine »
Comme a dit Lamartine)

Et puis après cet épisode
Pa Gritte et Ma Gritte
Et Grete arrivèrent à Lourdes

Ils entrent dans la Grotte
Et là, ça ne rate pas,
Grete rote selon le rite
Puis soudain s'écrie :« Crotte !
Pa Gritte Ma Gritte,
Le crûtes vous ?
L'âne avait une crête
Et savait la recette
De la poule aux œuf d'or
Qui dure.
Dare Dare
Il faut que l'on retourne
Voir cette vieille carne :
C'était une licorne !

Contée par un russkoff imbibé de vodka
Qui taquinait sa gratte
L'histoire des Gritt s'arrête là.
C'est plus frustrant qu'un tweet
Fût-il signé Schubert :
C'est une chose écrite
Par un pondeur de vers
Qui se moque du monde !

MIC 2012 02 06 flammesMais il y a quand même une moralité :
« Si Pa Gritte est muet,
Si Grete à gars beaux
Comme l'amas Delon donne à boire,
Si l'âne est la licorne,
Ma Gritte est un phénix :
Elle René de ses cendres !

7 février 2012

Les pousseurs de bois (Joe Krapov)


MIC 2012 02 06 Début BirdTrente deux pièces noires ou blanches, lesquelles pour moi ? Les blanches, c'est moi qui commence. Deux gorgées de Vittel et je pousse mon pion.

Je rêvais de surprendre, comme au détour d'un bois, mon adversaire du jour avec une ouverture de derrière les fagots. Je crois que j'ai réussi.

Elle arriva bien vite, la tempête crânienne ! Suant, réfléchissant, le regard effaré devant cette poussée du pion f en premier, Harry K. laissait déjà filer le temps à sa pendule, trifouillant dans sa mémoire, triturant ses neurones surpris pour savoir que jouer contre cet oiseau rare, 1. f4 le début Bird.

MIC 2012 02 06Dieu merci, il n'a pas répondu par le gambit From (1. ... e5) mais il a poussé son pion dame en d5.

Quelques minutes plus tard il s'avéra que nous avions transposé dans une Hollandaise en premier, un stonewall Arthurien : ce fou de Gauvain était en d3, Lancelot sur f3 paré pour sauter en e5 et Perceval derrière piaffant devant Guenièvre pour aller se poster en soutien sur f3.

Harry ne s'est pas méfié de ce qui se profilait : il a pondu un petit roque ! Sur la piste de danse, ma Dame se prépara à jouer les Salomé sous la boule à facettes. Meet me at the wrecking ball

Au bout d'un moment, il a fini par m'énerver aussi à se lever toujours, à marcher rapidement dans la salle du tournoi, à venir se rasseoir inquiet, à battre du pied nerveusement sur le parquet de la salle Galatée et à taper violemment sur la pendule après chacun de ses coups car il était toujours en retard.

Quand j'avançai mon pion en g4 à l'assaut de son cavalier, cela l'embêta au plus haut point. Je me levai alors, pris ma bouteille d'eau, allai voir sur les autres échiquiers comment s'en sortaient mes collègues.

Puis je revins m'asseoir. Il avait joué le fou pour dégager la case où pouvoir replier le cheval menacé. J'ai poussé g5 et j'ai attendu.

Il devint rouge, il éructa, ses yeux roulèrent, il en voyait vraiment de toutes les couleurs. Mais quand la tour vint en h3, il sentit que ça allait chauffer pour son matricule. Fais du feu dans la cheminée, je reviens chez nous

Je le gratifiai d'un sacrifice du cavalier puis je donnai mon fou et le mat s'ensuivit.

C'est ainsi qu'au tournoi open de Guichen, en 1992, moi, Joe Krapov, 1710 points au classement ELO, je battis Harry Krasparov, classé 1930. Avec une combinaison dont il m'avoua à l'analyse qu'elle était un peu dégarnie de dentelle. Je le lui concédai bien volontiers, ajoutant ceci, qui est de Proust, je crois : « Il n'y a rien comme le désir de gagner pour empêcher les choses qu'on fait d'avoir aucune ressemblance avec ce qu'on a dans la pensée ».

Il me regarda interloqué : le pauvre Harry ignorait que dans le fin fond de la Sarthe ou j'exerçais alors mes talents de pousseur de bois, ma réputation d'arnaqueur était déjà assez bien établie !

2 février 2012

This town is not big enough for both of us ! (Joe Krapov)

Ce Georges Pérec et ses émules, décidément, quels chieurs ce sont !

120129 121Celles et ceux d'entre vous qui me croient Breton se gourent lourdement, se mettent le doigt « in the eye until the knee » si je peux dire (M. Reverso et Mrs Joye me corrigeront si cette tournure est incorrecte). Je ne suis rien qu'un Ch'ti en exil chez les « Breizhou », un immigré presque intégré et je suis très heureux de me trouver ici où je vis et crèche depuis 1997.


Rennes ! Ses spécificités, ses délires, ses monuments, son côté « terriblement stérile » : « Rien n'y prend excepté le feu », dixit un supérieur de prêtres un poil ignifugé qui connut peut-être l'énorme incendie de 1720 et celui du toit surmonté d'emblèmes dorés sous lequel des gugusses en robe( et perruque ?) rendent un minimum de justice encore de nos jours.


120129 026Rennes ! Prenez pitié de moi ! On m'y torture en silence, on obtient de moi que je devienne une espèce de moine bénédictin rongé de chiffres, de listes et de procédures, on m'y trucide sous des tonnes de livres de comptes pour me fournir en retour, en un système de troc presque éternel, le peu de fric que j'utilise pour tortorer, nourrir mon épouse et quelquefois (souvent ? toujours ?) trépider du ciboulot. Oui, c'est ici que je vis et bosse et me meus tel un ongulé de première du désert.

 

Le bus n° 11 m'emmène, que l'on soit lundi, mercredi, jeudi, vendredi vers Cesson-Sévigné. Il tourne toutefois vers senestre et me dépose près du RU, entouré de jeunes gens peu réveillés qui s'en vont étudier toutes sortes de disciplines plus ou moins scientifiques.
 

120128 001Le week-end c'est une musique toute différente. Je me lève moins tôt, j'enfile mes godillots et je descends en ville humer les bonnes odeurs des commerces en extérieur des Lices, remplir de nourritures diverses une gibecière en osier puis je file en toute liberté zyeuter les merveilles et trésors qui m'entourent.

Rennes ! Que vous dire, sinon qu'une rivière coule en son milieu et qu'elle est bien plus jolie que le nom qu'elle porte. « Ouest-torchon » une institution du coin sise rue du pré-Botté pond moult lignes ces temps-ci sur ce sujet rigolo : on projette de doter d'un nom exotique les résidents de notre district : les Breizh-iliens !
 

120129 013Lorsque s'en vient le jour où le Seigneur se repose, je me promène souvent le long des péniches en file indienne qui semblent indiquer, telles les pierres du Petit Poucet sur le sentier du bois, le chemin du centre ville. Comment vous décrire mes coups de cœur, mes tours et détours, mes points de chute ? Que vous dire de cette ville que je chéris si fortement ?
 

111217 A 042Peste soit des Oulipiens, de leur liposuccion kilométrique et de leurs jeux cons-cons ! Mon lexique est restreint d'une voyelle rien moins qu'essentielle et c'est bien ennuyeux de devoir l'éviter ! Peut-être est-il plus simple d'énoncer poétiquement, en peu de sons, tout comme le font les poètes nippons, ces lieux qui me séduisent, ces coins de verdure qui me revigorent, ces étendues cernées de logis où l'on peut voir de jeunes mômes juchés sur des bêtes de bois, (cygne, lion, jument très Disney-Poppinsienne , bidet noir ou gris ou beige que, ni hic ni nunc ni oncques l'on n'entendit hennir ou gémir) ou bien grimpés sur des véhicules divers : gros truck rouge de pompier, zinc dénommé « Petit prince », etc ? (Goûtez-vous comme le périph' coupe le poil ici?)


Je commence donc cet énoncé de lieux "indicibles" de Rennes que l'on peut considérer, si on le désire, comme une suite de devinettes (très géocentrées, indeed forcément, beloved Joye !) :

 

DDS 179 Orphée


Orphée pétrifié :
Hermès enlève Eurydice
Et court vers l'Enfer
 


120129 092Déesse des nuits
Ton chemin cynégétique
Epuise tes chiens
 


DDS 179 Opéra


Un dieu et neuf muses
Se sont perchés sur le toit :
On joue « Othello »



DDS 179 place sainte-anneMère du Seigneur
Reine chérie des Bretons
Ce lieu t'est dédié


(On y vend de vieux bouquins,
Les mômes y tournent en rond)



120129 055


Les rues sont désertes
Doucement le soleil pointe
Le bout de son nez



DDS 179 parmiggiani

Tête découpée,
Victime d'un sculpteur fou
Rue de Coëtquen




120129 017Vénus dénudées,

Coloriées pour, nous dit-on,
Trouver nos voitures

(C'est nous supposer ivrognes :
On ne boit que du jus d'fruit !)


120129 104Volière importée
Edifice un peu chinois
Chez monsieur Bühler



DDS 179 kiosque


Ici, sous le kiosque,
Combien de temps, les scottishs ?
Le biniou s'en fout.


Ce Georges Pérec et ses émules, décidément, quels chieurs ce sont (Sévigné) !

P.S. Le titre de ce texte fait référence à celui d'une chanson des Sparks. (On se venge comme on peut des consignes tordues de son voisin du dessus !). 

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