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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
27 septembre 2017

Ecrire à Walrus ? 1, Gramophone

Le Boss
Quelque part en Belgique
Derrière la laisse d’un Jack Russell très autonome

"Sur mon phono /Mon bon vieux phono /Sans m’ déranger
J’ peux écouter / L’ premier numéro / De Chevalier
J’ vois La Scala /L'Eldorado /Et moi, en l’ver d’ rideau
Sur mon phono / Mon bon vieux phono / Qui chante faux

Vincent Scotto - Mon bon vieux phono" 

Cher oncle Walrus,

170924 265 076

Est-ce bien raisonnable de proposer
Un gramophone aux graphomanes ?

Et pourquoi pas bientôt, peut-être,
Des hormones de croissance à Superman,
Un nain jaune aux nymphomanes,
Un mégaphone au quadrumane,
Un hygiaphone au pétomane,
Une mégatonne à Rocket-man,
Un Gaffophone aux mélomanes ?

Un gramophone aux graphomanes !

Dans la cire si malléable du langage
Ils vont y creuser leur sillon,
Evoquer tous leurs craquements,
Leur stupeur et leurs tremblements,
Pondre des fables à la Chaîne,
S’terrer auprès de Caruso,
Faire soixante-dix-huit tours ou plus sur le plateau
Puis remettre l’aiguille au début
Et saturer le pavillon de tes oreilles
En racontant comme des sourds
Leurs symphonies de siphonnés,
Leurs sanglots longs de sonotones,
DDS 474 Porgy_bessLeurs rayures de bagnards du verbe
Jusqu’à ce qu’ils entendent
Le bras en bout de course se lever
Et donner le signal à tes nerfs fatigués
Et voient le chien blanc d’EMI
Un Jack Russell, assurément,
Assis devant le gramophone
Ecoutant la voix des maîtres du son
Et qui n’entend plus suivre
La voie qu’avait choisie son maître.

Un gramophone aux graphomanes !

Pourquoi ne pas proposer
« Nyctalope » à Pénélope ?
Faire l’obole de « Vinyle » au Discobole ?

Ignores-tu que nous avons été vaccinés avec une aiguille de phonographe,
Que pour combler le zézaiement des éléments
Nous pratiquons, toujours avides, le trop Zeppelin avant l’aphone ?
Que nous brassons de l’air pour en faire des chansons
Et tant pis pour la bière sur laquelle nous dansons !

Vois-tu comme j’ai été bon aujourd’hui, à faire si bref ? J’aurais très bien pu te parler longuement de Charles Cros qui voulut inventer cette machine-là, l’image en couleurs et des tas d’autres choses et qui s’en vint surtout avec l’ami Verlaine accueillir à la gare un dénommé… Comment déjà ? Ah oui ! Rimbaud !

Ce sera pour une autre fois ou pour ailleurs, cher oncle ! Porte-toi bien ! Tiens bien la laisse !
 

DDS 474 kitle

 

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21 septembre 2017

ECRIRE A RIMBAUD ? 8, Fripouille

Monsieur Arthur Rimbaud
B.P. 01 au vieux cimetière 
08000 Charleville-Mézières

Mon cher Arthur

« - Fripouille ! Andouille ! Arsouille !
- Ah non, non, non ! Pas les rimes en ouille ! »

Juliette Noureddine (Mémère dans les orties)

Revoilà, vas-tu te dire, l’autre casse-couilles aves ses bafouilles !

En vérité, tu ne vas rien te dire. Tous les échanges à la surface de la Terre, qu’ils soient de papouilles ou de carabistouilles, te passent désormais par-dessus alors que, de ton vivant, c’est toi qui survolais tout, ne t’attardais nulle part sauf pendant cette année terrible, 1872-1873 où tu collas aux basques de Verlaine, à moins que ce ne fût l’inverse ! Ou l’inverti. Ou l’inversitude. 

DDS 473 reviens

Je viens de terminer cette semaine la lecture de «Reviens, reviens, cher ami : Rimbaud-Verlaine, l’affaire de Bruxelles» de Bernard Bousmanne et j’en sors quelque peu abasourdi : que d’embrouilles dans votre vadrouille !

Cette société du XIXe siècle que tu enjolivas de tes mots de sauvagerie ne me semble composée que de fripouilles plus ou moins notables ou notoires. «Des noms ! Des noms !» me réclame la foule excitée qui n’a plus le temps de lire les pavés à la plage ou sous la plage ! Je n’en livrerai pas ou alors j’en citerai peu.

Je n’épouserai aucune cause, pas même la tienne, gueule d’ange échappée de la maison de redressement ! On constate dans ta relation avec le Pauvre Lélian – c’est l’anagramme de Paul Verlaine – une certaine radicalité. Et lui dont on nous fait poser sur un piédestal en airain sa poésie si musicale est peut-être bien le plus sale type de la bande. J’espère ne pas commettre d’impair en écrivant cela, même si c’est, paraît-il, préférable, l’impair, en temps de pluie, quand Gribouille se débarbouille dans la Meuse.

Je ne ferai pas son procès. D’autres s’en sont chargés après qu’il t’eût lardé d’un coup de pistolet. Parmi eux il y avait le juge Théodore t’Serstevens, être sévère qui incarcère les gens qui jouent du revolver et fait examiner pénis et fondement des mauvais garnements. Ce n’est pas une fripouille, c’est juste l’instrument de la loi. C’est un homme avec ses petits défauts : entre deux jugements, même avant le dîner, il se gave de petits gâteaux rue de la Régence. Le docteur qui procède à l’examen s’appelle Semal et je n’en dirai pas de bien mais je suis mauvais juge car je suis iatrophobe !

Verlaine, quand même ! Un homme marié de frais qui se soûle toutes les nuits avec du mauvais vin, qui bat sa jeune épouse, abandonne son jeune fils pour partir sur les routes et en capilotade avec un jeune fou débarqué des Ardennes, Boudu sauvé des eaux de la ferme de Roche, Rimbaud, pas mieux que lui, qui rythme la lecture des poèmes des autres d’irrespecteux «Merde ! C’est de la merde !». Qui le lacère à coups de canif ! C’est réellement un club sado-maso, l’atelier d’écriture, chez vous ?

Ah les vilains bonshommes ! Ne peut-on transformer le cercle zutique en cercle mutique ? Ah les vilains poètes cymbalistes ! Soiffards ! Alcooliques ! Parasites pas rasés ! 

mathilde mauté 2

Que faites-vous dans l’univers des de Fleurville ? Certes la particule est usurpée, la demoiselle est un peu godiche mais son blaze en jette un max, non ? Mathilde Mauté de Fleurville ! Doigt en l’air et tasse de thé, tout juste sortie du pensionnat, méritait-elle vraiment que vous lui écrivissiez cette chanson infâme, «Maudite Mathilde, puisque te v’là !» ?

Quels crétins vous fûtes, aussi, d’avoir laissé traîner en les tiroirs de sa maison ton manuscrit de «La Chasse spiriruelle»et ces lettres que tu adressas à Verlaine, celles que vous appeliez la «correspondance martyrique», notamment celle où tu lui dis «Ne me quitte pas ! Il faut oublier ! Tout peut s'oublier qui s'enfuit déjà, oublier le temps des malentendus et le temps perdu à savoir comment oublier ces heures qui tuaient parfois à coups de pourquoi le cœur du bonheur. Ne me quitte pas ! Ne me quitte pas ! Ne me quitte pas ! Ne me quitte pas !». 

DDS 473 petite-fripouille

Il est très intéressant ce bouquin et me laisse avec plein de questions. Peut-on ranger parmi les fripouilles le préfet de police de Paris qui accable Verlaine auprès de la justice belge en mentionnant ses liens avec les Communards et le fait qu’il ait continué à trravailler à l’hôtel de ville pendant la Commune de Paris ? Ils ont fait quoi, les préfets de police entre 1940 et 1944. Ils n'ont pas continué à bosser ? Ils ont quoi ? Collaboré à la bonne marche du monde ? Tant pis si  la marche est bancale et si les gens trébuchent. C’est juste la définition du voyou qui fluctue. Un type qui signe des contrats de vente d’armes avec la Turquie et voyage avec Donald T. dans son avion n’est plus un voyou de nos jours. C’est juste une aimable fripouille. Un patriote économique. C'est sympa, "fripouille", au finale. De la petite bière !

Et l’indicateur Lombard ? Son résumé des faits concernant l’affaire «Robert» Verlaine mériterait d’être reproduit ici in extenso. Je me limite à ceci : «Le ménage [Paul et Mathilde] allait assez bien, en dépit des toquades insensées de Verlaine dont le cerveau est depuis longtemps détraqué, lorsque le malheur amena à Paris un gamin, Raimbaud, originaire de Charleville, qui vint tout seul présenter ses œuvres aux Parnassiens. Comme moral et comme talent, ce Raimbaud, âgé de 15 ou 16 ans, était et est une monstruosité. Il a la mécanique des vers comme personne, seulement ses œuvres sont absolument inintelligibles et repoussants. Verlaine devint amoureux de Rimbaud qui partagea sa flamme et ils allèrent goûter en Belgique la paix du cœur et ce qui s’ensuit. […] Verlaine eut avec son amie [sic] Raimbaud une dispute à propos d’argent et après toutes les injures imaginables tira un coup de pistolet sur Raimbaud qui cria à l’assassin.».

Et M. Google books ? A-t-il le droit de reproduire partiellement le livre «Arthur Rimbaud et le foutoir zutique» de Bernard Teyssèdre ? N’est-ce pas surtout un crime effroyable de le faire de manière partielle et de couper le récit juste au moment où tu entres, Arthur, dans la maison des Mauté ?

Et Leonardo Di Caprio ? Etait-il bien raisonnable qu’il incarnât ton rôle dans un film «Hollywoodien» à souhait qui a l’air d'être un maximum crispant si j’en juge d’après le «trailer» ? Car on ne dit plus «bande-annonce» maintenant, c’est trop ringard d’utiliser la langue française. On dit «biopic» pour «biographie à l’écran», «talk show» pour «émission de parlote» et «think tank» pour "cercle de pensée" mais "chez ces gens-là, on ne pense pas, Monsieur" ou alors en 140 caractères sur Twitter. Autant se taire. Shut up ! Ce film craint tellement que j’ai déjà oublié son titre ! Ah oui, «Rimbaud-Verlaine : Total eclipse» ! Fondu au noir !

Et j’oublie le Paterne Berrichon, le Paul Claudel, l’Alfred Valette, tous ces gens propres sur eux qui ont rêvé de faire disparaitre «Une Saison en enfer» et de te présenter en chantre plus très mou de la catholicitude. Et ceux qui, en Belgique, ont bloqué l’accès aux pièces du procès de Verlaine jusqu’en 1985 !

Et Hubert-Félix Thiéfaine ? C’est quoi son «Horreur Harar Arthur» qui me traîne dans la tête depuis que je l’ai découvert ?

Et Thierry Beinstingel avec son roman « Vie prolongée d’Arthur Rimbaud » dont je n’arrive pas à décrocher tant il est bien écrit et me tient en haleine mais dont je sens qu'il va finir en eau de rose ou en eau de boudin ?

Et ce dévédé de «Rimbaud, l’homme aux semelles de vent», quand est-ce que je vais pouvoir le regarder ?

C‘est vrai ! Pourquoi je m’intéresse à tout ça, moi ? J’ai dû choper la fièvre à Charlestown cet été !

C’est que vois-tu, mon cher Arthur, je suis une fripouille normale, moi ! Je ne suis pas un héros, un voyant, un voyou, juste peut-être un voyeur, un voyageur ou un dévoyé : j’ai la saison 5 de «Girls» à regarder et mon Défi du samedi à écrire ! Ah non, ça y est, ça c’est fait !

Salut à toi cher vieux fripon fripé ! A un de ces samedis pour une autre bafouille sur ta tambouille poético-existentielle et les nombreuses magouilles autour de ta dépouille !
 

15 septembre 2017

ECRIRE A RIMBAUD ? 7, Extase

 Monsieur Arthur Rimbaud
B.P. 01 au vieux cimetière
08000 Charleville-Mézières

Mon cher Arthur

«Il y avait un jardin qu’on appelait la Terre
Il brillait au soleil comme un fruit défendu
Non ce n’était pas le paradis ni l’enfer
Ni rien de déjà vu ou déjà entendu»

Georges Moustaki

 


Cette semaine on me demande de parler d’extase. Et mon commanditaire de préciser : « Et ne levez pas les yeux au Ciel, hein ! ».
 

170712 Nikon 001

Dans ce cas c’est tant pis pour les nuages de Barfleur, pour ceux du Cul-de-loup à Morsalines qu’Eugène Boudin chérissait, tant pis pour les vitraux de la basilique de Mézières, ceux de Dieppe ou Varengeville et basta pour le partage de la meilleure des journées, celle des 32 kilomètres de marche sous la pluie de Saint-Vaast-La-Hougue, exit la merveilleuse étape au restaurant « La Bisquine » qui entrecoupa cette randonnée. Je ne parlerai pas non plus de l’étrange grenier de ton musée à Charleville, de ses chaises grises et des enceintes suspendues d’où sort l’étrange musique de tes mots traduits et emmêlés en différentes langues.

L’extase, dont Madame Wikipe nous dit qu’elle désigne un état où l'individu se ressent comme « transporté hors de lui-même », caractérisé par un ravissement, une vision, une jouissance ou une joie extrême, n’a pas grand-chose à voir avec l’exorcisme qui consiste à faire sortir de soi le je qui est un autre. 

170715 Nikon B 011

Mon extase principale de cet été est et restera bien longtemps encore la découverte de cette boîte à lettres fantastique, posée dans le cimetière de Charleville-Mézières, sans mention des heures de levées – tu ne te lèveras plus pour lire mes bêtises – à destination unique : Arthur Rimbaud.

Arthur Rimbaud ! Arthur Rimbaud ! Vous êtes arrivés à Arthur Rimbaud, terminus de la ligne ! Assurez-vous que vous n’avez rien oublié avant de descendre du véhicule !

L’été de Rimbaud ! Extase de la marche autour du lac des Vieilles forges, au-dessus de la Meuse à Monthermé, sur le chemin d’Hautot-sur-Mer à Dieppe ou le long de la mer au phare de Gatteville !

S’il y a bien quelque chose qui nous unit, toi et moi, quelque part, c’est bien ce goût pour la musique des mots, pour ce qui sort de soi et fait qu’un auditeur cesse d’être lui-même pour écouter, entendre ce parler différent, découvrir un coin nouveau de ce jardin humain que chante Moustaki.

Celles et ceux qui pratiquent la musique et la poésie savent le temps que cela prend et le travail qu’il faut fournir avant de parvenir à ces quelques secondes du bonheur de chanter ou d’entendre chanter.

Nous aurons ajouté, cet été de Rimbaud, à notre phonothèque et à nos souvenirs les aventures de Marina B. et Gisèle C. qui s’étaient inscrites à un stage de chant en quatuor et qui, tous les soirs, me contaient les pérégrinations de leur bateau ivre au pays du diapason 415, du canon à 24 voix, des montées de pression entre les voyageurs de ce projet étrange. C’est tout juste si on ne se tira pas dessus au revolver, cette année-là, au conservatoire de Dieppe et à l’Académie Bach ! Normal, on était à Arques-la-Bataille !

Mais au moment du concert, le vendredi soir, silence, admiration, extase : finies, les discussions de spécialistes, les pinaillages sur la prononciation, les fous-rires en cherchant la voiture ou la sortie dans le parking souterrain. Autant en emporte le vent !

 
A l’écoute de ces dames j’eus presque des frissons. Comment ? La divine mélodie de la Renaissance sortait vraiment de cette même bouche qui me dit quelquefois « T’as mal fermé le frigo » ou « Ca manque de poivre à mon goût » ? – Oui, ne t’inquiète pas, Arthur, chez moi l’extase ne dure jamais très longtemps. Mais, heureusement, ses effets sont impérissables .

J’ai failli ajouter que la voix me susurrait aussi « Chéri fais-moi l’amour, fous ce réveil en l’air et fais-moi du café brûlant comme tes lèvres » mais de fait, je confonds :  c’est la copine de Pierre Perret qui lui dit ça quand le soleil entre dans sa maison et en plus j’ai toujours des doutes sur l’orthographe de « susurrer » qui me fait d’ailleurs plus penser à Ferdinand le linguiste qu’à une fièvre érotique.

Celle de ce dimanche 10 septembre, d’extase, me marquera aussi. Nous nous produisions en concert privé avec mes ami(e)s du groupe Am’nez zique et les Biches aux jardins Rocambole à Bourgbarré (Tu parles d’un blaze ! Tout est annoncé dès que tu tombes dans le panneau !). Un jardin extraordinaire qui aurait plu à Moustaki comme à Trénet.

Vers la fin de ce concert de rengaines « métézorrologiques » nous avons interprété cette chanson plombante, « Nantes » de Barbara, dont je n’aurais jamais cru que j’aurais à la chanter un jour mais, vois-tu, tout arrive, qu'est-ce que je ne ferais pas pour faire plaisir aux copines ! Je crois que nous ne l’avions jamais aussi bien interprétée que ce jour-là. Je la dédie, a posteriori, à toutes les filles qui ont perdu leur père et plus particulièrement à cette semeuse d’étoiles de ma famille à qui c’est arrivé récemment.

 
Dommage que tu ne puisses pas entendre ces documents sonores, cher semeur d’étoiles des Ardennes !

A ce jour, même mal, le monde continue de tourner et nous, en avançant, de chasser sa folie, les ennuis et l’ennui, tant que faire se peut. De façon extatique et sans besoin du Ciel mais, comme dit la chanson, « Chacun fait, fait, fait, c’qui lui plaît, plaît, plaît ».

A un de ces samedis, cher Arthur !

P.S. Histoire de rigoler un peu après cette lettre tout compte fait assez sérieuse je te livre une des krapoveries que j’avais pondues comme premier jet d’une participation possible à ce Défi « extase » :

« L’extase du navigateur, c’est quand son sextant. ».

9 septembre 2017

GNU CHESS CONTRE GNUCHESS : UN MAT EN 44 COUPS !

Après une heure trente de jeu, mes voisins du mardi ont décidé d'annuler cette partie . Ils ont eu raison, il n'y a pas que le jeu d'échecs dans la vie ! J'ai quand même noté la position et proposé à GNU Chess de finir leur partie en jouant contre lui même. Le croirez-vous ? A la fin c'est GNU Chess qui gagne ! ;-)

 

8 septembre 2017

FAMILLE, JE VOUS HAIS ?

DDS 471 doryphore 117186272_o

« Le doryphore déferle sans beaucoup d’efforts
Mais avec grand effet
Sur les pommes de terre du Mont-Dore
Comme Anquetil sur Poulidor :
On est bluffé !

Le doryphore est homicide
Dans le jardin des Hespérides
Où la tomate est pomme d’or
Et le Jupiter impavide :
Le jeune Hercule tète encore.

Le chrysomélidé, l’abominable insecte,
Désespère tout jardinier qui se respecte,
L’esprit placide,
Et n’emploie pas d’insecticide
Contre les soldats allemands ;
Question d’affect,
Evidemment.

Le doryphore est très doué pour l’oxymore
En timide sans-gêne
Qui bouffe ton oxygène,
En aimable gredin
Qui bousille ton jardin,
En Dalton de banlieue,
Rayé de jaune et noir
Toxique dans vesprée,
Déchirant robe des champs
Au pourpre du soleil ».

DDS 471 betty boop

Ce sont là ses derniers mots, ceux que l’oncle Jean-Henri Piquechoux a inscrits dans son cahier d’observations scientifiques et poétiques. Après avoir écrit « soleil », il s’est éteint, victime d’une foudroyante crise cardiaque.

L’oncle Piquechoux avait fait fortune en fabriquant et en commercialisant des chaussures à talons aiguilles de luxe. A part l’appât du gain et l’entomologie, il n’avait aucune passion dans la vie et surtout pas celle de la famille.

Tout l’argent qu’il avait gagné était entreposé dans un coffre gigantesque, un espace fermé de la taille d’une salle de cinéma. La légende raconte qu’il venait parfois y plonger, y nager, dans son argent liquide. Il croulait sous le blé, crawlait dans son oseille, faisait de la natation dans ses millions. Il trempait sa barbaque dans ses plaques, faisait le fortiche dans son artiche, noyait son blues dans le flouze.

Parce que le vieux était un grincheux. Le fabriquant de pompes était avaricieux, n’en déplaise à tous ses envieux de neveux. Il y avait Donald le costumier de théâtre qui tirait le diable par la queue. Il y avait Henri, Philippe et Louis qui en étaient réduits à traquer le castor en tant que biographes de Simone de Beauvoir. Tous les quatre furent fort étonnés d’apprendre qu’avant de décéder l’oncle Piquechoux les avait couchés sur son testament. Du coup ils se levèrent, quittèrent le huis-clos de leur salle de bain où ils avaient lavé leurs mains sales et vinrent s’abattre comme des mouches sur les fauteuils de maître Jean-Paul Lanozé, le notaire, pour écouter les dernières volontés du vieil oncle.

DDS 471 entomo

Tous craignaient le pire. Le vieux grigou avait sûrement posé des conditions draconiennes à remplir avant que chacun d’eux ne puisse toucher à une part minime du pactole. Sans doute ordonnait-il qu’on prenne soin de ses ruches, de ses serres à mygales, de ses vitrines de papillons ? Donald trouvait patibulaires ces bêtes à mandibules qui s’envoyaient en l’air et les castors juniors avaient pris pour devise « Les insectes nous débectent ».

Et pourtant non, pas de clause tordue. Quand le notaire se fut tu Cardwell se demanda où était l’entourloupe, pourquoi il n’y avait pas coup de théâtre ce soir. Donald, Phi-Phi, Riri et Loulou touchaient bien la totalité du pactole à parts égales. Sans conditions aucunes.

Maître Lanozé leur remit la paperasse l’attestant, les clés et la combinaison du coffre. C’est peu de dire qu’ils s’y précipitèrent.

Las ! Ils n’y trouvèrent que billets en poussières, pièces plus percées que des galettes de Polydor, lambeaux de rêves et miettes d’espoirs.

C’était là la dernière farce du tonton flingueur. Sachant sa mort prochaine il avait introduit, en guise de dernière calembredaine, sa collection d’insectes dans sa tirelire géante. Il était advenu ce qu’avait entrevu cet oncle psychopathe : les doryphores avaient bouffé toutes ses patates !

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1 septembre 2017

ECRIRE A RIMBAUD ? 6, Grand-père

Monsieur Arthur Rimbaud
B.P. 01 au vieux cimetière
08000 Charleville-Mézières

Mon cher Arthur

« C’est pour toi que je joue, Grand père, c’est pour toi
Tous les autres m’écoutent mais toi tu m’entends »”»

Georges Moustaki 

Cette semaine on me demande de raconter des histoires de grand-père. J’étais justement en train de me demander si la biographie peut expliquer mieux que l’astrologie la personnalité de gens tels que toi.

Est-ce que c’est important pour les lecteurs de ton œuvre météoritique de connaître la vie de tes parents, le capitaine Frédéric Rimbaud et la paysanne Vitalie Cuif ? Peut-on établir un lien entre ta fin tragique et le fait que ce couple fut boiteux ? Que le militaire fasse campagne et laisse son épouse dans la sienne, soit. Qu’il lui fabrique un enfant chaque année et se barre définitivement après sept ans et demie de ce drôle de ménage-manège en lui laissant quatre mômes sur les bras, quelle influence cela a-t-il sur le cours de ta vie et sur ta littérature ?

Est-ce que c’est important de n’avoir pas de père ou d’avoir un père absent ? Et n’avoir pas de grand-père ? Aucun biographe ne mentionne l’existence des grands-parents Cuif ou Rimbaud. Au secours les généalogistes ! Mais c’est vrai qu’on décédait plus jeune qu’aujourd’hui à cette époque. 

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Astrologie, disais-je ? Mon grand père maternel à moi, celui dont je parlais la semaine dernière, était ainsi que toi natif du signe de la balance. Lui avait cinq ans quand son père est mort sur le front, en 1915, lors de la grande boucherie qui sévissait alors et qui porte le nom de première guerre mondiale. Le portrait de cet arrière-grand-père à moustache avait trôné longtemps sur un buffet de sa cuisine.

Avant de devenir espion pour le compte d’une puissance étrangère, - je suis désolé, mais quand on me demande de raconter des histoires, je raconte des histoires et pas l’Histoire ! - avant même de devenir mon grand-père, il avait été un jeune coq plutôt petit et mince, nourri de religion au point d’avoir été enfant de chœur, puis apprenti-boulanger, athlète vosgien (il avait gagné, paraît-il, le «Tour de Charmes» à la fin des années 20 après s’être entraîné à courir derrière la motocyclette de son parrain), apprenti boulanger, mineur de fond, syndicaliste, membre du Bureau International du Travail, décoré de l’ordre national du Mérite, maire de sa petite commune…

Il n’a jamais demandé, ainsi que tu le fis pour ton propre passé littéraire, qu’on brûlât les poèmes qu’il avait écrits dans sa jeunesse pour celle qui devint ma grand-mère. Par contre il n’a pas laissé d’écrits sur sa vie professionnelle et personnelle et pourtant il a connu la guerre, la prison, les combats syndicaux et politiques, a eu ses moments de gloriole, a voyagé énormément : Chypre, le Chili, la Mongolie, la Hongrie…

Simplement, quand il est mort, tout a disparu avec lui ! Ses livres, sa collection de minéraux, ses papiers qu’il couvrait d’une écriture presque illisible, les poèmes d’adolescence aussi, ainsi même que le portrait du grand père à moustache et également ma propre collection de timbres restée dans un tiroir de son incroyable bureau. Qui a pu embarquer tout ça ? Qu’ont-ils bien pu faire des œuvres de Kim Il Sung qu’il recevait Dieu seul sait pourquoi et comment et Il s’en fout bien, Dieu, ça n’était pas ses affaires, ces histoires de chicore et de chicorée, Nord contre Sud, Est contre Ouest, entre les Yankees et les Soviets, entre les Joe et les Krapov, les Fischer et les Spassky. Qui a vidé la maison ? Qui a joué le rôle des rois de la récupe ? Quelles peurs et quels appétits rôdent autour du brasier quand la bibliothèque ou le Parlement de Bretagne brûlent ? Pourquoi se fichait-il de transmettre ou pas quelque chose après lui ? Faut-il rêver ou pas de transmission, la préparer ou juste goûter tant qu’on peut au sel éperdu de la vie ? Et le jeu d’échecs pliant dont je me souviens d’un seul coup, où est-il passé ? 

DDS 470 jeu d'échecs

J’ai encore l’air de me plaindre mais non, je ne suis en manque de rien, sauf de son regard bienveillant. Mon grand-père m’a toujours couvert de cadeaux très étranges voire étrangers : une guitare polonaise, des jeux d’échecs aux pièces bizarres en provenance d’autres pays de l’Est, des disques importés de Tchécoslovaquie – mon frère disait «Tchévavaquie» ! – des livres d’Aragon ou d’Alexis Tolstoï. C’est lui qui m’a poussé à apprendre le russe au collège.

En retour il a toujours été admiratif devant mes choix, parcours et lubies. Que je lusse autant, que j’écrivisse des poèmes dès l’âge de quinze ans, que je maîtrisasse le subjonctif passé le comblait de fierté. Mon frère et moi jouions de la musique, je travaillais dans une grande institution culturelle, j’avais choisi de vivre ailleurs, d’épouser une étrangère, de faire des enfants, de voyager avec elle sur ses propres traces… Il avait, comme toi, à la fois ce rêve d’un autre monde et cet attachement quasi clanique à la famille.

Nous étions, lui et moi, malgré les années et nos différences, dans un genre de total respect, amusés et surtout enrichis l’un de l’autre. C’est aussi ce lien-là que je ressens vis-à-vis de toi et je ne serais pas moi-même sans une pirouette finale qui consiste à te livrer des extraits de ton portrait lus sur «Astrothème.fr» qui m’ont bien fait rire.

DDS 470 carte du ciel de Rimbaud

Vive la communication et la mobilité, Arthur Rimbaud ! La prédominance des signes d'Air dans votre thème favorise et amplifie votre goût pour les relations avec autrui et les déplacements de toutes sortes, qu'ils soient réels - voyages - ou symboliques - idées nouvelles, évasion par l'esprit. Vous gagnez en souplesse et en adaptabilité ce qui peut vous manquer éventuellement en affirmation ou en sens du concret.

Le mode Cardinal prédomine chez vous, Arthur Rimbaud, et indique une prédisposition à l'action, et plus exactement à l'impulsion et à la capacité d'entreprendre : vous avez à cœur d'initier les projets que vous avez en tête, de démarrer les choses, de les créer. C'est pour vous la partie la plus importante qui vous donne enthousiasme et adrénaline, sans lesquels vous pouvez rapidement vous lasser.

Les maisons cadentes – le groupe des maisons 3, 6, 9 et 12 – sont les plus importantes dans votre thème natal, Arthur Rimbaud :vous savez vous sortir de tous les mauvais pas grâce à votre mobilité et à votre légèreté, dans le bon sens du terme. (Fastoche, la légèreté, quand on a des semelles de vent !).

Vous avez un côté artiste et vous ne négligez jamais dans vos actes et dans votre façon de communiquer des concepts très clairs, bien que subjectifs : le plaisir et la beauté, voire aussi la sensualité, tout cela parfois au détriment de l'efficacité, de la durée, de la logique, et... du détachement.

Votre vulnérabilité de Solarien peut quelquefois venir du péché d'orgueil ou encore d'une autorité un peu trop prononcée. La frontière entre l'orgueil et la vanité est ténue : à vous de ne pas la franchir et de garder en vous cette noblesse de cœur qui fait une bonne partie de votre charme.

Comme tout bon Jupitérien, vous êtes chaleureux, ouvert, liant, consensuel et actif : optimiste, vous savez utiliser votre confiance en vous pour convaincre, gommer les différences d'opinions et laisser aux spécialistes le soin d'analyser et de parfaire les choses. (Ils ne confondent pas un peu avec Macron, là ?)

Forcément, vous trouverez toujours des mécontents qui vous reprocheront votre manque d'authenticité ou votre tiédeur voire votre manque de courage, mais pour vous, la victoire, c'est de vous faire aimer, et sur ce terrain, vous serez sans doute le champion toutes catégories ! (Pas autant que Justin Bieber mais pas loin !)

Le Cancer est un des signes dominants de votre thème de naissance et vous apporte une imagination et une sensibilité d'une finesse extraordinaire. Bien que méfiant au premier abord – et même au second... - dès que l'on vous connaît et que l'on a gagné votre confiance, on devine chez vous un cœur d'or malgré votre discrétion et votre important désir de sécurité qui vous fait rentrer dans votre coquille à la moindre alerte ! Vous êtes en réalité un poète (Oh ?) et si parfois on peut vous reprocher un peu de nostalgie ou de paresse, c'est en réalité parce que pendant ce temps, votre vie intérieure, elle, fonctionne à plein régime.

Votre domaine pourra être celui de l'action dans l'ombre, des causes humanitaires, de l'aide aux défavorisés ou à autrui d'une façon générale, du travail dans des endroits calmes et retirés (Vous prendrez bien un petit désert, par exemple ?) et dans beaucoup de cas, vous pourrez obtenir des domaines cachés autant de trésors que ceux qui ont des destinées publiques.


Bon allez j’arrête là les boniments de Madame Soleil !

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C’est marrant : j’aurais surtout voulu te parler, aujourd’hui, dans cette lettre, du lien entre le jeu d’échecs et le voyage des idées et des gens dans le monde, de la Sicilienne, de la Scandinave, de Kasparov et de Bobby Fischer mais ça ne s’est pas présenté ou très peu. Comme toujours Grand père a confisqué l’histoire pour la réécrire ! Mais ça n’est pas grave, ça reste assez drôle au fond. L’essentiel, comme disait Pierre Desproges, c’est de vivre heureux en attendant la mort. Et je préconise pour ma part de rigoler un max’ en posant qu’elle n’existe pas.

C’est pour cela que je lève mon verre de vodka à votre santé, Messieurs de la balance !


P.S. Les généalogistes me disent que ton grand-père Didier Rimbaud est mort deux ans avant ta naissance et que ton grand-père maternel, Jean-Nicolas Cuif est décédé quand tu avais quatre ans.
T’as vraiment pas eu de bol, Arthur !

P.S. Sur le capitaine Rimbaud, on peut lire aussi ceci.

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