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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
28 février 2019

L'unijambiste

Am stram gram pic et pic et calligramme !
Voici mon humble contribution, plus inspirée par Apollinaire que par Rimbaud, pour illustrer le mot «unijambiste» :

DDS 548 verre à pied

 

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22 février 2019

PARFOIS LA POÉSIE NE VOUS AIDE PAS À VIVRE

C’était un mec balèze
Qui faisait du trapèze
Dans un cirque ambulant.

Un jour qu’il s’entraînait
Il fut désarçonné
Par ce qu’il vit sous lui
Et tomba comme un steak
Dans le filet
De protection.

Et l’écuyère aztèque
Sur un cheval d’uhlan
Vint avec attention
Ramasser l’évanoui.

Lorsqu’il ouvrit les yeux
Ce fut le coup de foudre.
Elle fondit aussi,
Se remit de la poudre
Pour cacher son émoi.

Ils partirent ailleurs
Sur les bords du Zambèze,
A Rodez, à Rospez
Ou l’on fait le Tro Breizh
Et même à Saint-Tropez
Où B.B. vit à l’aise.

Moi je suis resté seul
Avec mes animaux,
Mon cirque miniature :
Je suis dompteur de puces
Et la belle acrobate
Ne m’accorde jamais
Un regard en passant
Et la contorsionniste
M’ignore tout autant
Et du coup je suis triste

Une de mes puces m’a dit
Que si le trapéziste
Et l’écuyère aztèque
Ont un jour un enfant
Ils l’appelleront Pégase.

Sa soeur a dit « Ecrase !"
Et je l’ai écrasée. 

15 février 2019

Isaure s’en prend à Google books

10 novembre 1886

On est tous le sagouin d’un autre. Allez savoir si ce petit singe dont on m’a chargé de faire l’éducation ne me traite pas de tous les noms d’oiseaux qu’il connaît dès que j’ai le dos et la soutane tournés ? « Le macaque sent toujours le hareng », comme dit le proverbe touareg made in Breizh.

Si on m’avait prédit au grand séminaire que je passerais ma vie à aller de château en château pour venir à bout, aidé de domestiques plus ou moins évolués, de ce genre de sapajous, j’aurais peut-être bien fait demi-tour et, plutôt que de devenir « ce bon abbé Raquin », précepteur du petit-fils de Madame la duchesse de Chevreuse, je….

Qu’eussé-je fait, au reste ? Nul ne sait ce que sera son destin, son cheminement, sa profession vers les vingt ans. Les voies du Seigneur sont impénétrables.

Et après tout, ce petit Manu dont je m’occupe est peut-être promis à un destin grandiose auquel j’aurai contribué pour une petite part ? Sera-t-il ambassadeur ? Général ? Député-maire ? Propriétaire terrien ? Banquier ? Président de la République ? Il n’en prend pas vraiment le chemin si j’en crois ce que j’ai noté dans mon journal intime :

« Jeudi 7 octobre

Le gosse, impassible, raisonneur, vantard, se moque de M. Moulin, devient insolent, malhonnête, refuse de corriger son devoir, me dit qu’il sera bien content d’être débarrassé de moi pendant la journée, est privé de monter à cheval, en revenant casse un service de porcelaine, jure ses grands dieux que ce n’est pas lui et est malhonnête pour sa grand-mère à laquelle il répond insolemment. Se tient passablement à table, fait presque une scène à la chapelle pour sa prière, ne cesse que devant la menace et s’en va se consoler dans le sein de la belle Julie pendant qu’Albert, le domestique, le cherche partout.

Vendredi 8 octobre
Le gosse fouetté en règle, à 8 ans, par sa grand-mère, Henri, un autre domestique, tenant le patient. La grand’mère vient me l’annoncer tout émue. Le gosse, néanmoins, s’en vient en classe quelques instants après en chantant et en dansant.

Etc., etc. "

DDS 546 comtesse_de_segur_un_bon_petit_diable

Il ne m’appartient pas de porter un jugement sur les gens qui m’emploient et me paient mais cet usage voire cet abus du châtiment corporel par Madame la duchesse me hérisse un peu le poil. Heureusement cette humiliation permanente des fessées cul nu, ces tournées de martinet, n’ont aucun effet sur le comportement du gamin. Il sort de la correction en tirant la langue, faisant les cornes et en chantant ces diableries dont je me demande bien qui a pu les lui apprendre. Peut-être tient-t-il ce caractère mi-rousseauiste, mi-voltairien de sa mère ? Ce serait ça l’âme russe ? En prendre plein la tronche et continuer à chanter Kalinka ou Bayouchki Bayou ? Ce doit être son côté bon petit diable ou général Dourakine. La princesse Galitzin et la duchesse de Chevreuse, à ce qu’on m’a dit, ne s’entendaient pas très bien. Il est bien possible qu’elle ait monté cet enfant contre sa belle-mère.

S’il y eut ce procès retentissant, si je suis là, c’est bien pour que l’étrangère soit dépossédée et que les biens, les terres et le château restent, par l’intermédiaire de ces deux enfants-là, dans la famille d’Albert de Luynes-de Chaulnes- de Chevreuse, je me perds dans leurs titres et me noie dans leurs pages de mauvais roman balzacien. Peu importe leur nom. Mon élève est un âne et tous les ânes s’appellent Martin. Asinus asinum fricat. J’enseigne le latin à un petit sagouin.

Si j’avais un peu de temps en plus, je reprendrais bien aussi l’éducation de la bonne, la petite Julie qui s’occupe d’Emmanuel. Encore qu’elle en sache beaucoup plus que moi sans doute sur les choses de la vie, au moins sur le côté « origine du monde » et Jeanneton prend sa faucille la rillette, la rillette (nous sommes dans la Sarthe). Il y aurait beaucoup à reprendre dans son effronterie et beaucoup à dire sur sa légèreté de cuisse. Je l’ai surprise cet après-midi dans la tour du trésor en compagnie d’un vaurien des alentours de Solesmes qui vient faire les quatre cent coups par ici. Je le reconnaîtrais entre mille : il a des sourcils broussailleux et des opinions socialistes. Je crois que ce banlieusard s’appelle Ulysse.

13 novembre 1886

Tout cela m’indiffère désormais ! Je laisse Julie à son Ulysse et Manu à son destin de 9e duc de Machin Truc qui sera passé chez les Jésuites du Mans. Je pars dans 24 heures pour un autre poste à Louviers chez M. et Mme de La Haye-Josselin. Pas fâché de quitter ce château qui me foutait les boules ! Merci Seigneur !

DDS 546 Google books

***

On est tous le sagouin d’un autre et je ne suis pas la dernière des sagouines. Qu’est-ce qui me prend de farfouiller dans la vie de ces gens qui ont peut-être encore des descendants vivants aujourd’hui ? Voilà que je donne libre cours à des tendances «journaliste fouille-merde» au prétexte que je suis échotière très épisodique au journal « Le Défi du samedi » ! Et tout ça parce que monsieur Krapov, mon ancien hébergeur, a fréquenté ce château si empli de fantômes et de phéromones dans sa jeunesse !

Il n’empêche. S’il y a un autre sagouin dans l’histoire, c’est celui qui a entrepris de publier le journal intime de l’abbé Raquin en vue de glorifier ce coin de France qu’on appelle le Charolais ! Un journal intime, ça devrait le rester non ?

Et s’il y a un sagouin ultime c’est forcément monsieur Google-books. Quelle manie il a, celui-là, de caviarder des passages dans les livres qu’il reproduit ! Mille milliards de bachi-bouzouks ! Va jusqu’au bout, espèce d’enflure numérique ! Soit tu as le droit de reproduire le livre et tu nous le donnes dans son entièreté, soit tu es un voleur et alors cache-toi et garde ton butin !

Foi d’Isaure Chassériau, tu m’énerves à faire les choses à moitié ! Toi tu salis et tu salopes quand nous on salive au salon ! Sagouin, va !

8 février 2019

OÙ EST LA NOBLESSE, OÙ EST LA ROTURE ?

Le docteur de Morgnies ouvre la porte de la salle d’attente avec brutalité.

Comme on est le 16 septembre 1880, il ne peut pas gueuler, faisant référence à Jacques Brel, tel un sous-off dans un bordel de campagne : « Au suivant !» mais on entend presque ces mots dans la vivacité de son geste. Il a la moustache en bataille, la corpulence d’un escrimeur et la carapace de l’homme prêt à tout voir et tout entendre de la vie sans moufter plus que ça. Une espèce d’aristocrate, le médecin, chez qui tout le monde peut entrer et déballer des horreurs, qu’il soit noble ou roturier.

Aujourd’hui, en ce début d’après-midi, ils sont deux, bien amochés, à faire passer en urgence. Les patients ne sont plus impatients quand quelqu’un poireaute parmi eux avec un œil sanguinolent. Le premier arbore donc deux magnifiques cocards dont l’un bien saignant et l’autre bonhomme a le bras en écharpe, enveloppé dans ce qui ressemble à une serviette de restaurant. L’aveugle et le paralytique mais dans la version bons bourgeois de Paris bien aisés. Cela le docteur de Morgnies l’a déduit de ce que les deux gars ont l’élégance parisienne des dandys et de ce que la serviette est marquée Bignon. Bignon ! Pour un type qui a deux cocards, c’est cocasse !

- Qu’est-ce qui vous amène, Messieurs ? Par lequel de vous deux je commence ?

DDS 545 Aurélien Scholl

- Monsieur, permettez d’abord que je me présente. Je suis Aurélien Scholl, journaliste à «L’Evénement». Nous étions en train de déjeuner tout à l’heure chez Bignon et nous allions sortir quand un jeune gommeux excité s’est mis en travers de mon chemin.

- Il a demandé à mon ami s’il était bien Aurélien Scholl.


- « C’est bien moi, monsieur » ai-je répondu. En quoi puis-je vous être utile ?


- « En rien, espèce de petit roturier ordurier ! Prends ça de la part du comte de Dion !» a-t-il dit et il a balancé à Aurélien une gifle et deux pêches dans la poire.


- Sans même se soucier de ce que je portais un monocle de chez Tati ! J’eusse pu perdre un œil dans l’histoire. Et c’est pour cela que je viens consulter l’homme de l’art que vous êtes. Y aura-t-il des séquelles à cette violence ? Le saignement s’est arrêté mais pour l’instant, je vous l’avoue, je vois tout flou comme si je m’étais fait flasher à l’issue d’un bal. C’est au point que j’ai eu besoin du soutien de mon ami Turgan pour venir jusqu’à vous.


- Et puis il y a aussi cette histoire de carafe. Tu es quand même tombé dans les pommes quand il te l’a lancée et que tu l’as reçue en pleine poitrine.


- Certes, mais je l’avais traité de manant, de charretier et de crocheteur.


- Tu étais quand même en droit de le faire après t’être ainsi faitboxer, non ?


- Laissez-moi examiner cela, dit le docteur. Mouais. Pas fameux, fameux, les yeux, surtout le droit. Déshabillez-vous que je voie le torse.


- Attends, Aurèle, je vais t’aider.


- Non, laissez, dit le docteur, je vais m’y coller. Avec votre bras en écharpe ce ne serait pas pratique.

Le docteur examine le thorax où il y a un énorme hématome. Il tâte les côtes du journaliste et demande, intrigué :

- Dites voir ? C’est normal que vous ayez toutes les côtes fendues ?

- C’est que j’aime beaucoup rire et me moquer, Docteur ! Mais je n’ai jamais eu l’intention de faire du mal à qui que ce soit. Ca reste toujours de bon aloi.


- Je sais, je sais. Bon rhabillez-vous. A part l’honneur du comte de Dion, il n’y a rien de cassé.


- Mais je ne lui ai rien fait à ce garçon ! Je ne le connaissais même pas avant cette séance de pugilat!


- Vous avez sûrement dû écrire quelque chose le concernant. Mais ce n’est pas mon affaire. Je vais vous prescrire une ITT


- Qu’est-ce que c’est ? Ca fait mal ?


- C’est juste une interruption temporaire de travail. Vous n’allez récupérer la vue que dans dix-neuf jours et il vous faudra attendre encore onze jours avant que vous ne puissiez retourner au théâtre et rédiger vos comptes-rendus ironiques.


- Vous me connaissez donc, Docteur ?


- Oui je m’intéresse un peu à ce que vous écrivez.


- Et pour les yeux vous me donnez quoi ?


- Deux escalopes le matin et deux escalopes le soir, à apposer sur les orbites.


- Mais ça va me coûter horriblement cher ce régime carné ! Vous n’avez pas de médicaments, plutôt ?


- Je suis contre les prescriptions de produits chimiques ! Je fais de l’homéopathie. Contre la boucherie, j’utilise la boucherie. Si vous avez des problèmes financiers, attaquez le comte en justice et comptabilisez votre facture de bidoche dans les dommages et intérêts que vous lui réclamerez. A vous maintenant monsieur Turgan. Déballez voir un peu ce que vous avez dans votre serviette.


- Oh moi c’est juste une estafilade !


- Avec quoi vous êtes-vous fait cela ?


- Mon ami Aurélien a voulu se défendre contre le comte. Il a sorti son stylet.


- Un stylet ? Les journalistes écrivent avec un stylet maintenant ? C’est fini le stylo ?


- Je devais partir ce soir pour Bruxelles, précise Aurélien Scholl. Bien que la Belgique soit un pays d’honnêtes gens j’avais emporté à tout hasard mon parapluie de voyageur dont le manche renferme un stylet.


- Vous avez raison, il y a là-bas de vilains bonshommes qui tirent à vue sur les littérateurs français !


- Et comme il n’y voyait plus rien, c’est moi qu’il a blessé.


- Ce que je ne vois vraiment pas c’est pourquoi le comte s’en est pris à moi.


- Cherchez la femme, Monsieur Scholl ! Quel livre avez-vous publié récemment ?


- « Fleurs d’adultère ». Pourquoi ?


- Cherchez de ce côté-là. Je suis sûr que l’explication est là. Voici vos ordonnances, Messieurs. Lequel de vous deux règle l’addition ?


- C’est moi !


- Non c’est moi !


- Je vous en prie, je vous suis redevable de…

***

Après avoir raccompagné les deux hommes jusqu’à la porte et avant de faire entrer le client suivant le docteur de Morgnies jette un œil au portrait d’Isaure Chassériau qui trône dans son vestibule.

- Eh bien dis-donc, Isaure ! Le journaliste-bashing commence de bonne heure, cette année !

2019 02 08 Isaure flashball

1 février 2019

Seize contre seize sur le forum, c'est ça le quorum !

- Vous aussi vous êtes tout seul sur le terrain, sire Banania ?

- Comme vous voyez, bwana Arthur ! J’espère qu’on aura le quorum. Parce que roi contre roi, je ne sais pas si vous savez, c’est nul ! Et nulle même ! Mais je vois votre dame qui arrive !

- Enfin ! Non mais dites donc, Guenièvre, qu’est-ce que vous foutiez ? Je ne sais pas si vous savez mais y’a match aujourd’hui ! Vous séchez les tournois, maintenant ?


- Désolé Majesté mais le cavalier Lancelot m’apprenait à jouer d’un instrument de musique africain !


- Alors vous mélangez les pièces avant même qu’on ait commencé ? Du métissage musical, maintenant ? Une blanche vaut toujours deux noires avec cette… chose, là ?


- La cora il appelle ça. J’ai l’impression que ça va super-marcher ce truc-là ! C’est bon pour le décorum, qu’il dit, de jouer de la cora. Surtout des chorus.


- Chorus, cora, décorum, on va y perdre son latin avec vos lubies ! En attendant, je ne sais pas si vous voyez, on n’a pas le quorum !


- Ah mais maintenant que je suis là on peut y aller. Profitons de ce qu’elle n’y est pas la dondon fessue du gars Mamadou !


- Taisez-vous malheureuse, vous allez nous créer un incident diplomatique ! Tenez la voilà justement avec toute sa cour, le prince noir, Razibus Zouzou, Tornado et compagnie ! Mais qu’est-ce qu’ils foutent, les gars de chez nous ? Les deux autres fous, là, Loreille et Lardu, je n’ai jamais vu des bouffons pareils !


- Vous n’avez vraiment pas le sens de l’humour, vous, Arthur, hein ? Ils doivent juste être encore à fianchetter dans les coins !


- Avant même que j’aie construit mon château ? Ah ben bravo !


- Ecoutez, ce sont des conceptions hypermodernes. Faut pas rester comme ça attaché à l’ancien monde non plus !


- Et les pions, ils sont où ?


- Ben c’te question ! Au lycée, à surveiller les mômes ! Tiens non, les voilà tous qui arrivent en poussant les deux tours !


- Bon, manque plus que qui ? Lancelot et Saint-Georges comme d’habitude ! Si les autres en face nous sortent un dragon, on va être mal !


- Ils ont pas des têtes à jouer de la sicilienne ! Faut peut-être arrêter aussi de jouer 1. e4, sire ! lance Lancelot en prenant sa place sur la case c1.


- C’est ça, c’est ça, dévoilez nos plans secrets ! Déjà si eux n’avaient pas le quorum pour débuter la partie, ça m’arrangerait assez, voyez-vous ! Ah, voilà Saint-Georges, on est au complet ?


- Alors, bwana Arthur ? On commence ? Pendant que vous palabriez avec votre dame, on a atteint le quorum et plus si affinités nous aussi ! Allez-y ! Tirez les premiers, messieurs les Anglais !


- Y m’énerve celui-là, maugrée Arthur, avec sa culture et ses expressions toutes faites. Je ne sais pas ce qui me retient de lui balancer un orang-outang sur la gueule. Non quand même pas b4, c’est trop risqué. Allez tiens, une anglaise. 1. c4 ! Accrochez-vous les noirs !

 Pour assister à la bataille, cliquez ici 

puis faites avancer les pièces ci-dessous en appuyant sur la flèche orientée vers la droite. 

P.S. Et alors comme ça, y'aurait une arnaque ?
Je ne serais pas capable de gagner avec les noirs ?

Pas plus tard qu'hier encore, voyez-vous...

(En fait c'est juste que je ne publie pas les parties que je perds !)

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