Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le cahier de brouillon de Joe Krapov
30 mai 2012

NUL N'EST MAÎTRE DE SON DESTIN par Joe Krapov

120525 026Adeline Pasdebol ne les voit jamais venir, les malheurs qui lui arrivent. Il faut dire qu'elle n'est pas vraiment bien taillée pour affronter l'adversité. Toute mince et longiligne, vêtue toujours de manteaux longs d'une neutralité et d'un classicisme tels que nul ne la remarque jamais dans la foule, elle n'a de surprenant sur elle que ses jolis yeux noirs et ce casque de cheveux roux qui lui donne un air de gravure de mode. Une gravure de mode de 1906. Yvette Guilbert en moins potelé.

Il y a aussi la paume de sa main dans laquelle une voyante a remarqué une ligne de cœur salement brisée et une ligne de chance pas très droite non plus. Avec son air un peu souffreteux de jeune fille pâle et très sage, on n'est pas surpris de la voir prendre tous les matins le bus n° 4 à l'arrêt République à Rennes pour aller s'enfermer dans le bureau d'une administration là-bas au bout des quais. Elle y fait de la comptabilité ou note les appels pour monsieur Frémiaux quand celui-ci n'est pas encore rentré du restaurant d'affaires dans lequel il a emmené M. Moretti, un client, et le repas doit être bon car le patron tarde à rentrer.

Adeline pour sa part déjeune dans la cuisine de chiches portions restées de son repas de la veille au soir qu'elle réchauffe au four à micro-ondes. Une vie de célibataire jusqu'au bout des ongles, jamais peints, allez savoir pourquoi. Pourtant, quand on s'appelle Pasdebol, ce serait bien d'être un peu verni, non, comme disait madame de Lenclos (1) ?

Quelquefois sa collègue, la grosse Françoise Lheureux, lui tient compagnie pendant ce repas frugal. Elle est tout le contraire, boulotte, énorme même, et l'on se demande si M. Frémiaux ne les a pas engagées intentionnellement aussi différentes l'une et l'autre. Une façon pour lui de se rassurer en regardant son épouse le soir : ni squelettique, ni obèse, ce qu'il faut, là où il faut et comme il faut. Les hommes, c'est rien que des cochons, ça ne raconte que des blagues salées, ça ne pense qu'à ça.

Mais justement, aujourd'hui, au volant de sa Kangoo rouge, Adeline a laissé tomber tous les hommes et abandonné le boulot derrière elle. Elle a traversé Nantes, a pris la route du Croisic et puis a suivi la direction de Noirmoutier. Elle a eu un petit frisson et a serré très fort le volant en franchissant le pont qui rattache l'île au continent car elle n'aime pas bien l'idée de la chute de son auto avec elle dans le vide. C'est là un sentiment idiot car depuis qu'elle conduit elle n'a jamais perdu le contrôle de son véhicule et pourquoi serait-ce justement aujourd'hui que... Ne discutez pas ! Adeline Pasdebol est comme ça et elle ne se refera pas.

120518 133C'est la première fois qu'elle met les pieds et les pneus en Vendée et elle est déjà étonnée et agréablement surprise de ces villages aux maisons basses, aux toits de tuile, aux murs blancs et aux volets bleus. Elle s'est posée au camping de La Guérinière où elle a loué un mobil-home pour quatre jours. Elle a déballé ses affaires, a cassé la croûte car il était treize heures puis elle a repris sa voiture en direction de Noirmoutier-en-l'île. Elle s'est promenée dans les petites rues derrière le château, a mangé une glace sous le ciel bleu mais nuageux puis, pleine de courage, elle s'est engagée sur l'allée Jacobsen, une longue esplanade d'au moins un kilomètre. La voie macadamisée est réservée aux cyclistes et aux piétons. A sa droite elle a le chenal d'accès des bateaux au port de Noirmoutier. A gauche, à la façon des polders de Hollande, ce sont des marais salants dans lesquels on peut voir quelques échassiers blancs qui cherchent là leur pitance sans se soucier plus que cela des promeneurs qui les observent depuis la digue.

Adeline Pasdebol en photographie quelques-uns en prenant garde de ne pas trop s'appuyer contre la balustrade pourtant bien solide. Un peu plus loin, pour photographier un joli chardon « à la Nantaise », c'est-à-dire « en gros plan » (2), elle pose un genou en terre et elle entend « CRAC ! »

120518 226Crac ? Non, ce n'est pas son pantalon, les filles minces les craquent rarement. C'est le lacet de sa chaussure droite qui, rompant en plein milieu, vient de rendre l'âme. On fleurira sa tombe avec des œillets mais un autre jour (3)! Elle arrange le coup comme elle peut avec ses deux moitiés de lacet. Elle en trouverait peut-être en ville, bien qu'elle n'ait pas repéré de mercerie parmi les restaurants et les boutiques de souvenirs. Mais elle est rendue bien plus loin que le milieu du chemin et elle a trop envie d'aller jusqu'au bois de la Chaise pour y voir les cabines de bain blanches et la jetée quasi-anglaise qu'elle a repérées dans son guide des éditions Ouest-France. Alors, Clop, Cataclop, Clop, Cataclop, elle avance, un tant soit peu déséquilibrée par moments mais en se disant que c'est un incident bénin, que ça aurait pu être pire, son pantalon ou une pluie diluvienne. En pensant à cela, elle s'aperçoit que le ciel est devenu gris et se souvient qu'elle n'a emporté ce jour, au vu du beau temps du matin, ni K-Way ni parapluie, ni cape de pluie.

Allons, qu'importe ! Les nuages Baudelairiens et Boudinesques réveillent son désir de peindre – à ses heures perdues elle fait de l'aquarelle. Elle continue de photographier la nature car pour ces courtes vacances elle a décidé de (re)devenir la femme sauvage, la Vénus et le fou à la fois, de céder à l'invitation au voyage. Elle est un peu à l'étranger ici, désireuse de succomber aux tentations.

Au bout de la jetée le chemin tourne à gauche, la ramène dans l'intérieur des terres puis un plaisant panneau indique la direction de la plage. Elle ôte ses chaussures, ses socquettes et marche pieds nus dans le sable. Ploc ! Ploc ! Cette fois ce sont de grosses gouttes de pluie qui dessinent par terre des cercles dentelés. Elle presse le pas. Tout au bout, après les rochers, le chemin longe un camping et il y a un café-restaurant qui ne paie pas de mine mais qui est le bienvenu. Elle s'y réfugie, s'installe à la terrasse sous le vélum et commande un café.

Le patron le lui apporte, il reste posté là, debout, près d'elle et la dévisage longuement. Il lui rappelle vaguement quelque chose à elle aussi.

- Excusez-moi... Je me trompe peut-être... Est-ce que vous ne vous prénommeriez pas Adeline, par hasard ?
- Si, Adeline Pasdebol.

Maintenant elle le remet. C'est Rocky Badluck, son premier amour. Il était guitariste dans un groupe de rock amateur. Son vrai nom c'était Roger Malchance. Tout le monde se moquait d'eux à l'époque. « Pasdebol et Malchance, vous êtes faits l'un pour l'autre ! » leur disait-on en riant.

C'est gênant de le retrouver là, dans l'odeur de graillon de cette gargote qu'il tient où il nourrit et dépanne les campeurs et les randonneurs de passage.

En même temps, ce n'est pas si gênant que cela.

MIC 2012 05 28 la terre vue d'un satellite russeLa preuve : le lundi suivant monsieur Frémiaux a reçu une lettre de démission de sa comptable et Françoise Lheureux a reçu une carte postale d'Adeline : « J'ai rencontré quelqu'un que je n'avais pas vu depuis longtemps. Je crois que je vais habiter au bord de la mer pendant quelque temps. Je te réécrirai pour t'en dire plus long. Prépare-toi à venir nous voir cet été ».

On comprend mieux à la fin de cette histoire pourquoi les Bretonnes trouvent toujours du bon à la pluie. Elles ont de la chance : la terre est recouverte à 70% d'une eau qui ne cesse d'aller et venir. A cause du fil des Parques et du lacet cassé, on comprend mieux aussi pourquoi ce récit s'intitule « Nul n'est maître de son destin » (4).
 

(1) Piqué à Philippe Gelück)

(2) Piqué à Agnès Varda

(3) Piqué à personne, ça m'est venu tout seul en dactylographiant !

(4) En même temps le prénom et le nom du personnage étaient imposés par Anne-Françoise ainsi que la rupture du lacet et les retrouvailles avec le copain de lycée par Dominique, sans compter les titres de poèmes du « Spleen de Paris » fournis par l'animateur quelque peu sadique de notre atelier d'écriture « In Real Life ». J'espère qu'on ne s'y PAUME pas trop dans ce texte, malgré tout ça !

Publicité
Publicité
25 mai 2012

Galets-jade

A chaque marée montante, la mer arrivait avec une nouvelle vague de plaisanteries stupides, de devinettes et d’attrape-couillons dont elle faisait cadeau aux galets :

- Pincemi et Pincenous sont dans un bateau. Pincemi tombe à l’eau. Qui est-ce qui reste ?
- Pincenous ?

Et la mer pinçait les galets et rigolait bien.
 

DDS 195 100803E 054La fois suivante, elle leur demandait :

- Est-ce que vous avez déjà glissé dans la piscine ?
- Non, répondaient les galets.
- Et manié le béton à la tonne ?
- Non plus.

Et la mer s’écroulait de rire.

- Pourquoi tu ris ?
- Ce sont des contrepets. Si vous changez deux lettres de place ça prend un tout autre sens.
- Manier le tét… Ah oui, tu nous as bien eus, disaient les galets !


Douze heures après elle disait :


- Il fait beau et chaud aujourd’hui
- Oui ?
- Allez je vous aide, c’est aussi un contrepet !
- Il fait chaud et beau ? Mais ce n’est pas drôle ?
- C’est parce que c’est un contrepet belge !
- Ah ?

Et la mer se pliait de rire de plus belle.


La fois suivante :


- Savez-vous pourquoi les paquebots belges ont trois cheminées ?
- Non . C'est un contrepet ?
- C'est parce que les transatlantiques !
- ???
- C'est une devinette absurde que j'ai piquée à Gotlib !

Et la mer se couvrait de rides sur toute sa surface à force de rire.


Et toutes les douze heures, la même situation se répétait sur la plage de Saint-Jean-Cap-Ferrat.
La mer sans arrêt roulait ses galets.

 

24 mai 2012

COMMENT CA S'ARTICULE par Joe Krapov

- En préambule, ça gesticule, ça s'accumule, la revendication pullule et c'est à ce moment-là que tu modules avant que ça ne bascule et que ça brûle sous la canicule. Après quelques conciliabules, tu fais croire que tu capitules et tu proposes de monter un vague comité Théodule. L'air de rien tu les manipules, tous ces crédules ! Tu prends le truc sous ta férule, tu charges la mule, tu repars dans ton véhicule. Dans ton vestibule, rue de la Vistule, tu fais venir un expert en chimie de la molécule. Mets-toi bien ça dans l'auricule : il t'explique, cellule par cellule, de celui qui se démantibule la clavicule quand on le stimule à celle qui hulule pour dissimuler qu'elle simule, du spermato jusqu'à l'ovule, comment ça se passe quand on copule.

- Mais les canards, ça pond des œufs ?

MIC 2012 05 21 091227 1199- Les canes, petite ridicule ! A la virgule près tu notes les formules de l'émule de Curie, tu les récapitules au sein d'un fascicule. Tu le mets dans le circuit des Eurocrates. Tous ces jeunes animalcules sortis de l'ENA et qui postulent pour un poste de ministricule– ça pullule comme des pustules, c't'une maladie qu'ils s'inoculent ! – vont se faire les mandibules sur tes feuillets minuscules même s'ils sont nuls. Pas besoin qu'on les bouscule pour qu'ils s'activent le pédoncule et te maculent du papier ! Pendant ce temps, toi, sans scrupules, tu prends du recul, tu t'en vas dans la péninsule te faire dorer la pilule, tu spécules, tu joues les noctambules au casino, tu y amasses des monticules, bref tu arrondis ton pécule. Savant calcul ! Heureux cumul ! Au retour les jeunes somnambules à particule t'auront pondu une bulle majuscule digne des douze travaux d'Hercule. Tu le signes, l'opuscule, tu l'intitules, tu l'immatricules, tu l'encapsules pour qu'il circule. Et voilà comment s'articule, mon Ursule, une directive européenne qui stipule « la taille réglementaire des testicules de fuligules ». Y'a pas de quoi en faire une pendule ! Qu'est-ce que t'en dis, ma libellule que j'adule ?

- Rien. Tu m'as mise sur les rotules ! J'ai la vésicule qui ondule quand tu régules !

- Alors là, tu m'impressionnes, ma pellicule !

16 mai 2012

L'art vulgaire est de retour ! (Joe Krapov)

J’ai toujours la chair de poule quand je pénètre dans un musée. Mais je m’illusionne : Isaure Chassériau, en chair et en os, ne viendra pas à ma rencontre pour me dire qu’elle a aimé les aventures que je lui ai inventées. Ou pour se chicorer avec moi en me traitant de tronche de cake. Qu’elle surgisse d’un seul coup dans cette exposition d’oeuvres de Léonard de Vinci serait un peu fort de café.

DDS 193 mona_lisaUne fois cette première appréhension passée, il me faut mettre les bouchées doubles et jouer des coudes comme tout un chacun pour m’approcher de la Joconde. Mona Lisa ! Cette fille-là, mon vieux, elle est terrible ! Et l’offrir en pâture à des régiments de touristes japonais au Louvre c’est comme donner de la confiture à des cochons ! Notez que je n’ai rien contre nos amis les Nippons bien nippés mais ce n’est pas la peine d’avoir inventé le Nikon, le Canon et le Minolta pour venir se presser comme des citrons devant le tableau et faire chou-blanc photographique : un flash, devant une vitre, tu ne vois que le flash sur la photo, eh, cornichon ! Je sais bien que vous avez les pieds en compote et l’esprit en capilotade après avoir expédié Florence, Venise, Amsterdam et Bruxelles en quatre jours mais quand même !

De toute façon, cette fille nous rend tous fous. Même les Allemands, gens d’une extrême sagesse, déclarent désormais devant le chef-d’œuvre : « Ach so ! Das ist Da Vinci code ! ».

Mais bon, faisons comme tout le monde et jetons un œil à cette croûte. Tâchons de comprendre pourquoi il y a lieu de se faire envoûter et de devenir le dindon de la farce. Certes, Mona nous tient la dragée haute avec son petit sourire en coin et l’air mi-figue mi-raisin de celle qu’on dévore des yeux, qui a de l’estomac et aussi les moyens de te rouler dans la farine. Mais est-ce que toutes les femmes ne sont pas un peu comme ça ?

Et à ce moment-là, pour plomber ma croustillante théorie, il y a Isaure Chassériau qui me balance sa légende urbaine préférée :

- La Joconde, Joe Krapov, c’est un homme ! Comme Sheila ! ».

En général, je digère mal ce genre de plaisanterie et cet humour assez GLLOQ. Je deviens comme tous ceux qui ont vu la moustache ajoutée par Marcel Duchamp à la binette de la donzelle et en sont restés comme deux ronds de flan. Au lieu de se fendre la frite, le gratin aime assez à se scandaliser, cela permet de discuter le bout de gras dans les salons où la marquise sucre les fraises et où Marcel jadis trempa sa madeleine (il s’était embarqué sans biscuits !).

Léonard a-t-il peint son giton ? Faut-il en faire tout un fromage ? Il y a plus de cinq cents ans Gala Voici et Closer n’existaient pas. On ne trouvait pas encore des conseils pour garder la ligne haricot vert dans les gazettes de l’époque, noyés entre douze pages de pub pour surgelés de luxe et l’horoscope des lions : « Ne ramenez pas trop votre fraise aujourd’hui, sauf si vous venez d’être élu Président d’une république ».

Comme ces ragots sur les « people » me font bâiller ainsi qu’une huître et qu’Isaure, pour le coup, m’ennuie, je traîne mes guêtres un peu plus loin et me retrouve nez à nez avec « L’Annonciation », directement importée depuis la Galerie des Offices de Florence.

DDS 193 annonciation

- Je suis désolée de soulever un lièvre, me glisse à l’oreille Isaure Chassériau-Lecrampon, mais la jeune Vierge à qui on vient dire qu’elle aura droit à un lardon sans même passer à la casserole avant, on n’a pas l’impression que ce soit la fin des haricots pour elle, tu ne trouves pas, Joe Krapov ?

- Les voies du Seigneur sont impénétrables, Isaure. Personnellement j’aime surtout l’ange dans ce tableau. Il, ou elle, a l’air assez peu concerné par son message à la noix de coco. Si les anges avaient un sexe et qu’il fût masculin, je dirais même que ça lui casse les noix, d’annoncer, tout sucre et tout miel, à l’heureuse élue que les Dieux de l’Olympe ont encore mijoté un mauvais coup et que c’est elle la victime. Mais maintenant qu’on lui a mangé le morceau, Marie, la moutarde ne lui monte pas au nez parce que…

- Moi, ce qui me troue, m’interrompt Isaure Lamalpolie, ce sont les bouclettes des deux morues. On ne donne pas l’adresse de leur merlan dans l’audio-guide ?

DDS 193 dame-a-l-hermineJ’essaie de semer le fantôme déchaîné d’Isaure – et ce n’est pas du nougat ! – et je me retrouve devant « La dame à l’hermine ». Ca ne mange pas de pain de le dire, ce portrait est une réussite. On marche sur des œufs pour ne pas troubler ce moment-monument de grâce pendant lequel la jeune fille à la résille semble tourner la tête vers quelqu’un qui lui cause. Et l’hermine immobile, avec sa patte gauche levée, est comme le symbole absolu de l’aristocratie : pour cet animal-là toute la maisonnée est aux petits oignons et l’on pense à Baudelaire : tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté…

- Oseille, oui, Joe Krapov ! Je l’ai bien connue, ce sac d’os ! A l’époque je me faisais appeler Isaura Chasserio avec un « o ». Elle, c’était Cecilia Gallerani. C’est son mec, Ludovic le more qui avait tout le blé. Il l’a pour ainsi dire tirée du ruisseau, elle a juste eu le cul bordé de nouilles…

Il ne faut pas pousser grand’mère dans les orties ! Trop d’Isaure tue Isaure ! Je m’enfuis en courant et je sors du musée. J’avoue, j’ai fait le mauvais choix. J’aurais mieux fait d’aller visiter l’expo du douanier Rousseau. Là ils ne l’auraient pas laissée passer, l’étrangère à la robe rose qui a tant à déclarer. Finalement, ils n’avaient peut-être pas tort, les autres avec leur slogan « FRONTIERES ! »

Tu parles, Charles ! Va-t-en lutter, toi, contre ton ennemie intérieure, quand elle utilise tes propres armes !

11 mai 2012

Il y a douze pieds dans un alexandrin (Joe Krapov)

Evidemment, dès qu'il s'agit de découper un cercle, les Bretons sont là ! Dans le rond de Saint-Vincent, ils découpent quatre-quarts, ils s'en paient une tranche, ils essuient leurs doigts bien gras sur le fond de leur bragoù-bras et ils font glisser par là-dessus un coup d'cid' dont vous m'direz des nouvelles, M'ame Corneille !

Côté kouign-amann, c'est peut-être plus sympa et plus prudent de couper le cercle en huit, rapport à votre taux de cholestérol limite et au fait que, justement, autour de la table, on est huit !

Ce qui est bien aussi, à part couper les cheveux en quatre et se fiche du tiers comme du quart, c'est de couper les tartes en douze. Surtout si on a invité Blanche-Neige, les sept nains et les trois petits cochons pour un buffet disneyatoire. Ou les sept mercenaires et les trois mousquetaires, les ceusses qui s'entendent comme les cinq doigts de la main pour mettre les bouchées doubles.

J'aime bien le chiffre douze. Il y a les douze travaux d'Hercule, le mystère des douze chaises d'Il'f et Petrov, les douze mois de l'année républicaine : Vendéemièvre Brunolemaire Primaire Névrôse Morôse Mixomatôse Terminal Loréal Orignal Labrador Corridor et Fruidor.

Il y a aussi, qui sont si drôles, les douze signes du zodiaque :

Le bélier, qui enfonce toutes les portes même quand elles sont ouvertes ;

Le taureau à qui l'on mène la vache en désarroi et la vie dure dans des arènes ;

Les gémeaux dont je ne sais jamais lequel est Pollux, lequel est Castor, lequel est Simone de Beauvoir et lequel Jean-Paul Sartre ;

Le cancer qui ne s'use que si pile Wonder (Stevie, tu ne devrais pas conduire avec ta vue qui baisse !) ;

Le lion mowim mowim qui dans la jungle terrible jungle est mort ce soir ;

La vierge bien souvent marrie d'échapper à la conception en vue de rester immaculée (surtout, si, ah le coup vache, on lui montre le taureau en action !) ;

La balance que j'ai failli oublier – quelle injustice c'eût été de ne pas la dénoncer à la police comme la championne des hésitantes ! - ;

Le sagittaire avant de s'en servir une rasade supplémentaire, de la potion magique du Sar Rabindranath Duval ;

Le scorpion qui squatte, mais jamais trop longtemps, le dos des grenouilles naïves ;

Le capricorne c'est finicorne et direcorne que c'était la villecorne de mon premier amourcorne ;

Les poissons qui n'ont pas forcément la taille réglementaire et qu'on est obligé de rejeter dans le marais de la maison VIII où leur regard vitreux s'épanouira sans doute, surtout celui des carpes s'il y passe un lapin ;

Le verseau qui gaspille si souvent la flotte – Mademoiselle Zell, sors de la douche, ça fait trois quarts d'heure que j'attends mon tour ! - et dont on ne voit jamais le recteau.

Il y a aussi les douze coups de minuit et surtout, plus scientifiquement, les douze heures d'une demi-journée que mesurent la trotteuse, la grande aiguille et la petite sur la montre ou la pendule en prenant toutes les positions du Time-Kama-soutra avant de se retrouver l'une par-dessus l'autre, comme en pile à midi ou minuit pile et de repartir pour un tour.

Il y a également les douze divinités de l'Olympe, douze hommes en colère et j'espère aussi qu'à me lire quelqu'un(e) se fendra un jour une ou deux de ses douze paires de côtes.

Vous avez remarqué le titre ? « Il y a douze pieds dans un alexandrin », c'en est un !

Mais assez philosophé pour aujourd'hui. Il est temps, grâce à Jacques Grello, Guy Béart, aux Frères Jacques et aux Krapov brothers, de savourer l'histoire d'un cycle * de douze heures dans un monde idéal : il y fait beau ! 


* En parlant de cycle, j'ai tellement pétalé dans le yaourt ailleurs sur la toile que j'ai oublié d'en parler, des pétales de la photo. Pour la peine, en voici d'autres. Des Rennais, cette fois. Et la boucle est bouclée !

DDS 193 120324 045

 

Publicité
Publicité
10 mai 2012

Y aller tout de go ! par Joe Krapov

Dans un abominable tournoiement de voyelles et de dentelles la folle de Chaillot, suivie d’une kyrielle de chats énamourés qui miaulent leurs émois d’en chaleur du mois d’août, vint s’affaler sur le divan de Siegmund Freud.

- Je suis claqué, dit Jacques Lacan.
- Je ne suis que laqué dit le canard chinois en claquant le pupitre.
MIC 2012 05 07 bus désir- Je m’en fous, dit la folle. Envoyez le yaourt que je pédale dedans (1) ! Parlez-moi comme si je ne prenais pas langue avec un émissaire d’un pays étranger. Dissolvons l’absolu, chatouillons le sublime et le subliminal, sublimons le guili-guili. Tirez-moi la languette et ce sera bien le diable si de l’automatique ne sort pas ne serait-ce qu’une balle perdue, celle dont Bourvil chantait qu’il ne s’en souvenait plus. Je vous émoustillerai, mon Siegmund de mes deux, à la Salpêtrière. Mais les douaniers qui arraisonnent la cargaison de mon désir me retiennent un chouïa dans leur vilaine casemate. Il vous faudra attendre, en fumant votre épouvantable cigare, que je reprenne goût à la grande vadrouille et que la patrouille me relâche. Iatrophobe dissolue, aristocrate batifoleuse, je n’aurai de cesse, ô mon bien aimé, que d’être consommée, consumée, comprimée plutôt que périmée du périnée. Amoureuse rieuse, amulette ombrageuse, allumeuse lulumignonne autant que fanion bourguignon, terrible amuse-gueule d’agapes tonitruantes, je chialerai, je piafferai si ne sort pas de sous ma tiare de diablesse quelque lapsus parlant, quelque association d’idées folles dont tu feras ton miel. Hérisse-moi le poil, tire sur le cheveu jusqu’à la voie lactée : à l’infini du tif se trouve l’inconscient sourire du yaourt, l’épastrouillant, le diabolique bifidus, celui qui n’a foi qu’en lui-même et en son double négatif, la petite morue prise dans les filets du remords cœur d’artichaut lapin des Landes. A la saison des pêches, récoltez les noyaux, ramenez-les at home et mettez-les dans des bocaux pour les vendre au Trocadéro tandis que s’amenuise le sens de la tirade au nez de Cyrano. A la fin de l’envoi, te touché-je, mon gros ? ».

La folle, se tournant, vit que Lacan dormait avec le chat Zigmund sur le plateau de go.


Elle partit sans payer et sourit au printemps. Faites-en autant !

(1) Contrairement à ceux qui trouvent le Giro dur, la folle de Chaillot trouve le Giro doux.

6 mai 2012

LA PLUIE par Joe Krapov

Pluie par Beah


PLIC !

PLOC !

Qu'est-ce que cela implique ?

Qu'on sorte son pébroque !





4 mai 2012

Quelques divagations chez le chapelier fou

L'accent circonflexe est tellement un accent à couper au couteau que  qui le coupe en deux se retrouve avec un accent grave et un accent aigu !

L'accent circonflexe a plusieurs noms. Les enfants des écoles primaires l'appellent chapeau. Il existe cependant plusieurs sortes de chapeaux.

Sur le â de Cléopâtre le chapeau s'appelle une tiare.

Sur le ô de trône, ce qu'on voit c'est une couronne.

Sur le â de pâte une toque de cuisinier.

Sur le ô de patenôtre une mitre d'évêque.

Sur le a de hatif, vous étiez tellement pressé de brasser de l'air que le chapeau s'est envolé et son nom aussi

Sur le â de « se faire porter pâle » le chapeau est un képi de deuxième classe à la visite chez Courteline. Ca peut aussi être un calot de soldat Chveïk (ca se lave à sec, Jaroslav !) et ça me fait penser que l'accent circonflexe à l'envers sur le r de Dvořák vous oblige à prononcer son nom "Dvorjak".

Sur le â de âne, le chapeau s'appelle un bonnet d'écolier

Lorsque règnent les duègnes sévères, on comprend que l'heure est grave pour les midinettes ibères et que l'accent l'est aussi.

Et maintenant, des nouvelles de la crise aiguë :

On appelle éphéméride (effet mes rides) un truc qui sert à marquer sur les traits (ou d'un trait) le passage des années.

On appelle épée l'instrument tranchant avec lequel Alexandre le Grand résoud l'énigme du nœud gordien et Saint-Georges de Lydda... Non pas aujourd'hui, j'ai pitié !

Même s'ils se ressemblent beaucoup, il ne faut pas confondre l'accent aigu et l'apostrophe dont l'animateur immortel, M. Bernard Pivot, déclarait encore il y a peu que sur le ï de coït il y a deux points qui s'envoient en l'air ! Merci Bernard !

Revenons au cirque Cornflakes :

Sur le û de brûler, le chapeau s'appelle casque de pompier (pyromane ?).

Sur le ô de Ventôse, Pluviôse et Nivôse c'est un bonnet phrygien.

Sur le ê de pimbêche le chapeau est bien souvent un petit bibi prétentieux.

Sur le ô de Côte d'Azur, le chapeau de paille, ma biche, est souvent d'Italie.

Née en 69 avant Jésus-Christ, Cléopâtre dormit quelquefois tête-bêche avec son Jules coiffé d'une couronne de laurier.

Qu'il y ait un chapeau sur le ô de "ôter son galurin en entrant dans une église" me semble assez contradictoire.

J'ajouterais bien aussi que sur le â de zouâve le chapeau s'appelle une chéchia mais faudrait voir quand même à pas trop déconner, ma e-réputation en souffrirait peut-être !

Le saviez-vous ? Les accents ne servent parfois à rien d'autre qu'à embrouiller le peuple sur les règles d'orthographe et de prononciation. Ainsi on écrit « pèlerinage » mais on prononce « pèlerinage » et on écrit « réglementation » pour prononcer « règlementation ».

A part ça monsieur et madame Toidlà-Keujmymette ont un fils comment s'appelle-t-il ?

Umlaut ! Bravo Angela !

120501 A 089

Publicité
Publicité
Le cahier de brouillon de Joe Krapov
Publicité
Archives
Publicité