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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
28 janvier 2011

C'est-y du Lare ou du cochon ?

100516A_007De la fenêtre où ne pas naître
On peut voir le feu naître
Qui attise la question
Du pourquoi des volets
Sinon pour dérober
Au regard des curieux
Ce que l'on a volé.

De la persienne d'Aragon
Persienne
Persienne
Persienne
Perd sienne
On voit sombreros et mantilles

Et les danseurs de séguedille

Qui ramassent et comptent leurs billes :

Si chacun des quatre perd « sienne »
Les voleurs, as du leurre,

Ont gagné des « leurs »

De valeur.

 

Alors ils tirent le rideau080815_673
- C'est chose A(i)zay aux ladres
Surtout dans l'Indre -
Et laissent rêver le badaud,
Le vagabond pour qui n'abondent
Que les cailloux sur le chemin.

 

Dieu banni de ces intérieurs,
Voyageant dans l'incognito
Sur cette terre incognita,
Je marche et ne m'arrête pas.
S'ils ont laissé les volets clos,
S'ils ont tiré la mousseline,
Baissé les stores, c'est à raison.

 

S'ils abritent dans leur maison
Leur peur de l'autre et leurs vieux crimes
Derrière d'épaisses jalousies
C'est qu'ils n'en sont que les victimes.

 

Ce que je comprends mal
Chez ce drôle d'animal
C'est qu'il se pose alors devant
Un grand ou un petit écran
Qui lui dévore tout son temps.

 

(Extrait de « Dieu s'ennuie le dimanche et s'emmerde les autres jours, sans compter qu'il se fait chier le reste du temps et qu'avec un titre aussi long ça ne va pas être simple de trouver un éditeur pour ce roman-puzzle que je ferais mieux de publier en feuilleton sur le Défi du samedi et/ou ailleurs » par Joe Krapov)

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21 janvier 2011

Une rupture de taille X Ixelles (Joe Krapov)

Ma chère Isabelle

Il m’a tiré dessus, ce con ! Avec une vraie balle d’un vrai revolver ! Tu parles d’un impair ! Il n’est pas près de me revoir ! Heureusement il n’a touché que mon poignet gauche. Ca a beaucoup saigné mais le médecin a dit que ça restait superficiel. Il n’empêche, pour l’instant le bandage est très voyant.

Je t’écris du train qui me ramène de Bruxelles à Paris. Je joins à cette lettre une carte postale représentant l’étang d’Ixelles. De Paris, je gagnerai Marseille.

101227_011Quand je pense que tout cela est parti d’une minuscule et ridicule tradition d’hospitalité belge, j’en rigolerais presque. Je sais bien qu’il y avait de l’eau dans le gaz entre Paulo et moi et c’est d’ailleurs pour nous rabibocher un peu que je l’avais rejoint ici. Mais dans la chambre de l’hôtel Blanc, ça a recommencé. Sur la table près du lit, il y avait une petite pochette verte. Paulo s’est jeté dessus, l’a ouverte et il est entré aussitôt dans une de ces phases de méditation mystique dont j’ai foncièrement horreur. Bien sûr il a encore sorti son cahier et il a commencé à noter ses réflexions autour du truc.

Ce n’est pas pour débiner mais moi, quand je viens dans une ville étrangère, ça n’est pas pour jouer au poète inspiré par deux carrés de chocolat et qui du coup, n’entend plus sortir de sa chambre avant d’avoir pondu une romance entière là-dessus. J’avais fait le voyage en train, je crevais la dalle et j’avais envie d’aller faire un tour dans les petites rues qui entourent la grand’place. Je lui ai proposé de venir avec moi mais Môssieu Paul a préféré rester là à taquiner sa muse.

101227_012Dans l’auberge où j’ai déjeuné, je me suis levé un charmant minet. Nous avons vite sympathisé, nous sommes allés chez lui et je lui ai fait son affaire bien comme il faut. Ensuite il m’a fait visiter la ville, charmante au demeurant, et sur la fin de l’après-midi je suis allé retrouver Paulo à l’hôtel. Il avait écrit une espèce de valse hésitation autour du gingembre et de la lavande, des choses, qui, je l’espère, ma chère sœur, ne te froisseront pas. Cela me semble relever, d’ailleurs, si pas du jésuitisme, au moins du plus pur catholicisme et Dieu sait si Paul et toi avez en commun d’être très friands de cela !

« Que faire devant un tel dilemme
Laisser choisir celui qu’on aime ?
S’il choisit la lavande et la tranquillité
Saurez-vous faire croix sur la lubricité
Et remettre à plus tard l’appel de Volupté ?

Si, malgré la blancheur étrange de la chambre
Il choisit la luxure, opte pour le gingembre,
Serez-vous en état d’honorer promptement
Son vil désir d’accouplement ?

S’il mange l’un, vous laissant l’autre,
Comment se mettre au diapason ?
Les chocolats du bon apôtre
Mettent le diable en la maison !

La solution la plus cruelle,
Mais la plus juste en vérité
Serait de mettre à la poubelle
Ce cadeau qui génère tant de perplexité

Ou, solution la plus gourmande,
De les avaler tous les deux.
Tant pis si l’on nous réprimande
Quand nous passerons devant Dieu,
Ce n’est pas là un crime odieux
Que d’aimer le gingembre et aussi la lavande !"

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- Il y a trois trucs qui ne vont pas ! » ai-je dit à Paul
- Ah bon ? Et quoi donc, Tutur ?
- D’une ce ne sont pas des chocolats, ce sont des préservatifs. Et de deux la position des pieds ne correspond pas réellement à nos pratiques. Et de trois, tu n’as pas préféré l’impair !

C’est à ce moment-là qu’il m’a tiré dessus. Il est fou ! Un vrai pédé, ce type ! Il a failli me faire deux trous rouges au côté droit ! Je crois que ce coup-là m’a dégoûté à jamais de la littérature et des littérateurs ! J’en ai assez soupé de ces ambitions-là ! De Marseille je gagnerai l’Afrique, on peut y faire du commerce de manière bien plus lucrative. Je crois de toute façon que je n’étais pas vraiment doué pour la poésie et que, après toutes les souillures de ces dernières années, ça n’aurait pas plu à maman que je laisse notre nom dans l’histoire littéraire.

Quant aux sanglots longs et monotones de Paulo au violon, aussi vrai que je m’appelle Rimbaud, ça me fait une belle jambe, désormais !

Je t’embrasse, chère sœur !

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L'étang d'Ixelles en 1873 (Daguerréotype d'Isaure Chassériau)

15 janvier 2011

Tracteur nantais

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14 janvier 2011

Allô, Adrienne ? Pourquoi tu tousses ?

- Excusez-moi, madame l'épicière, mais à l'intérieur de cette boîte je n'ai trouvé ni crabe ni pinces d'or !

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- Ah bon ? Mais il ne fallait pas l'ouvrir ! Vous avez trouvé quoi à l'intérieur ? Du sucre en poudre ?
- Non, de la schnouf d'ecclésiastique !

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- Ecoutez monsieur Krapov, je crois que vous ne comprendrez jamais grand chose à l'art. Si la religion est l'opium du peuple, l'art est celle de l'élite. Voulez-vous, en guise de dédommagement, que je vous offre un tire-bouchon ?
- Moi, vous savez, je ne bois que de la Chimay bleue, de la Zubrowka ou de l'eau plate. Un décapsuleur, peut-être, plutôt ?
- C'est comme la boîte de crabe, ce n'est pas utilitaire, c'est de l'art. Choisissez votre modèle... et foutez le camp !



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Photos prises à Bruxelles en décembre 2010

5 janvier 2011

Le Monomalpoly des Papous (Joe Krapov)

Le Monomalpoly des Papous est un jeu inspiré d'une émission dominicale de France-Culture. Il est tout à fait possible que vous ne connaissiez pas France-Culture car c'est la radio officielle du FBI (le FaceBook des Intellos) et c'est vrai que ça n'a pas grand chose à voir avec les émissions de téléréalité ni avec la presse « people ». Par contre, en tant que futur étudiant(e) en économie des périodes de crise, il est essentiel pour vous de connaître les règles du Monomalpoly.

Le jeu est composé d'un plateau circulaire où sont représentés, vus de dessus, différents studios de la maison ronde qui abrite l'ORTF, 116, avenue du président Kennedy, Paris 16e, de quatre pions de couleurs différentes et de deux séries de cartes. Le dos des cartes « Malchance » représente un cyclope qui se met le doigt dans l'oeil jusqu'au coude. Le verso des cartes « Caisse de singularité » représente un masque de Venise en blazer. Au recto les cartes « Malchance » indiquent une épreuve à réaliser et les cartes « Caisse de singularité » proposent deux mots qui n'ont rien à voir ensemble comme, par exemple, « Moloch » et « pistache ».

Le premier joueur lance les dés, compte les points et avance son pion d'autant de cases qu'il veut sur le plateau. Il tire une carte « Malchance » et une carte « Caisse de singularité ». Les second, troisième et quatrième joueurs font pareil. Quand chacun est doté de deux cartes il prend une feuille de papier et un crayon et essaie de réaliser  ce qui lui est demandé par les deux cartes. On a un quart d'heure devant soi et on sent bien, derrière, la pression du désir de qualité littéraire.

A titre d'exemple voici quelques unes des épreuves que l'on peut être amené à réaliser pendant l'heure et quart que dure le jeu. Toutes les parties durent en effet une heure et quinze minutes.

Ecrire des bouts rimés à partir des mots qui riment avec « atlante » et « suspension ». Ca peut donner:

« LE CANCRE MOU »

Sur les cariatides, en la ville de Nantes,
On voit le grand balcon de l'ancienne pension
Où Jules Verne rêvait d'épopées exaltantes
Dans des mondes lointains, toujours en expansion.

Sa copie d'SVE, oeuvre de dilettante,
Restait pendant ce temps un peu en suspension,
Bloquée sur cette idée à vrai dire navrante :
« Si mon oncle n'en avait pas, on l'appellerait Atlante »


Ecrire, à l'exemple de Raymond Roussel, une homophonie approximative de « otage des fortifications ». Il y a par exemple « potage des mortifications » ou « Cottage des nidifications ». Imaginer l'histoire qui mène de l'une mise au début du texte à l'autre mise à la fin.

Exercices de style : écrire sous forme de dialogue de théâtre, de nouvelle policière, de fable de La Fontaine ou de tout autre chose la scène suivante : une dame dont le mascara coule quand elle rit ou quand elle pleure reçoit un coup de téléphone. Sa correspondante lui demande ce que c'est que « l'autobus S ». Plus tard elle est à la caisse du supermarché et engage la conversation avec un historien belge qui lui fait du rentre-dedans avec son caddie.

Du côté de chez Signe : faire le portrait d'une personne dont le signe astral est « rez-de-chaussée » et dont l'ascendant est « autobus ».

Etat de chose : vous êtes une suspension et ça fait des lustres que personne ne vous a écoutée. Racontez votre vie en y glissant les mots « Iowa » et « Lorraine ».

Les grands airs des aires de repos : sur l'autoroute des vacances, vous vous êtes arrêtés sur l'aire de Moloch. Expliquez pourquoi on appelle ainsi ce lieu. Racontez ce qui s'est passé ici de remarquable.  Résumez ensuite votre histoire sous la forme d'une chanson sur un air connu.

Experts contre faussaires : pour les faussaires, réécrivez les phrases de début et de fin d'un roman peu connu d'un auteur célèbre. On mélange vos tentatives avec l'original et les experts doivent retrouver qui a écrit quoi.

Diagnostic littéraire à l'aveugle : en vous aidant de votre intuition, essayez de deviner quel auteur célèbre a écrit ce texte méconnu :

«  La jeune femme avait franchi les fortifications. Après les portes mordelaises, le pavé de la ville devenait glissant. Au coin de la rue du Chapitre et de celle de la Psallette un Arlequin aux yeux bleus derrière son masque noir invitait à entrer dans une pizzeria au rez-de-chaussée d'une maison à pans de bois. L'inconnue se souvint qu'ici, jadis, un étudiant avait été pris en otage par une serveuse de crêperie que l'on disait plus belle que la reine des Atlantes. Quand elle arriva en vue de la place du Calvaire elle eut l'intuition que quelque chose de bizarre allait se produire... (Ici, des points de suspension).
A l'entrée de l'ancien cinéma Gaumont un cerbère borgne filtrait les entrées. Le Cyclope ouvrait l'oeil et le bon. Il eut soudain l'air effaré en voyant devant lui la jeune femme vêtue de rose et coiffée de macarons.
- Isaure Chassériau ? Vous ici ? Alors comme ça vous aussi vous aimez la musique d'Ivan Le Moloch et de ses potes les gitans ? »


Sans oublier les lettres inattendues : imaginez la lettre que pourrait écrire le Cyclope de l'Odyssée à Jean-Marie Le Pen en y insérant les mots « borgnes » et « rois ».

Vous l'aurez compris, le Monopoly des Papous peut se jouer tout seul comme à huit ou à dix ou à plus, cela même sans pions, sans dés ni plateau de jeu. Quand c'est comme cela, on l'appelle « atelier d'écriture ». Personnellement, ça fait plus de douze ans que j'y joue toutes les semaines et je ne m'en lasse pas. Je pousse même le vice jusqu'à écouter l'émission originale «Des Papous dans la tête» chaque dimanche à 12 h 45 sur France-Culture, la radio du FBI. Amusez-vous bien vous aussi ! Comme dit le poète Charles Trénet, "Il suffit pour ça d'un peu d'imagination !".

P.S. Tout ce texte était en fait une Publipapoucité ! Y a de la mise en abyme au château !

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