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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
30 mars 2012

Quoi de neuf ? Pérec !

DDS 187 drapeau_canada_1_Ca se passe dans un paradis sur la terre, une contrée de grands lacs, de forêts profondes. Le gibier abonde, on peut le suivre à la trace dans la neige, poser des collets, tirer le caribou ou, plus original, l'orignal au fusil. On commence à situer ?

On récolte la sève sur le tronc des érables pour en faire du sirop et la feuille de cet arbre a fini, elle aussi, par coller au drapeau. La région est vaste, peu peuplée, sauvage au possible et pourtant, la perfection n'étant pas de ce monde, Georgette Pérec est bien en peine.

A l'inverse du sieur Juvet – rien à voir avec Louis ! -, elle se demande : « Où sont les mecs ? ». Ces pleutres se calfeutrent : ils s'avèrent incapables de remédier à l'état de siège. Il est impossible en effet de sortir de Silène de Mont-Louis, leur village, car un monstre sanguinaire terrorise les passants sur la route menant à la bourgade. Il ne réclame ni brebis ni fille de roi, il dévore tout le monde, ce gros insecte rançonneur, les entrants comme les sortants.

- A grand mal, grand remède ! Prenons notre destin en mains nous-mêmes, les filles ! a déclaré Georgette Pérec. Le moment de mettre fin à la vie de ce tourmenteur sur pattes est arrivé !

L'aimable Canadienne enfile sa canadienne et prend sa canadienne car il lui faudra bien plus d'un jour de route pour atteindre l'ennemi.

DDS 187 aiguiser- Tu vas camper au bord du lac ? lui demande son amie Madeleine Basdelaine. Caaalice ! J'irais bien avec toi mais j'suis ben trop molle du genou ces temps-ci !

- Crisse de Tabarnac ! Je m'en vas l'assassiner, ce dragon ! J'ai entendu une jolie tune d'un nommé Daniel Lejeune dans mes écouteurs. Ca dit ceci : « Je sais une ville au nord de l'Ontario. J'ai là des souvenirs de jours paisibles et bienfaisants. Si jamais j'ai besoin de me ressourcer, je retourne vers elle de manière à renaître. » Moi aussi, Madeleine, je rêve de voir cette ville et des tas d'autres endroits du monde où l'on s'amuse sûrement beaucoup et pour cela, ben, il faut nous débarrasser de c'tenflure de maringouin géant !

- Je t'admire Georgette, mais comment vas-tu faire pour venir à bout de c't affaire ?

- Je vais d'abord affûter mes outils et je l'amadouerai en lui balançant l'air du gars Daniel. Il m'écoutera et pis au moment où lui aussi se sentira « désemparé et sans aide » je lui collerai un grand coup d'ma cognée en gueulant « Timber » ! D'ordinaire j'sus contre la violence mais là, t'avoueras, elle est nécessaire. Comme le maudit gouvernement ne veut pas s'emparer du problème, c'est à nous de le régler, non ?

DDS 187 090819_030


Ainsi fit-elle. Elle se mit en route et parvint face au monstre dans le milieu du troisième jour de son périple. Le gros diptère était au milieu du sentier en train de se taper une broue avec une paille.


Georgette posa sa guitoune, entama sa tune, la bête l'écouta puis, comme un ouragan, la routarde lui monta au pif et, vengeresse, lui planta le fer dans l'antepronotum, lui coupa la somite et la culicida du Gregor Samsa du démon clamsa ! Un coup d'aiguille et le dommage était causé, la cause gagnée et morta la vaca !


***


Depuis ce jour, grâce à la courageuse Georgette Pérec, les maringouins de cette partie du Canada où l'on parle encore le français ont tous rapetissé, ne voulant pas connaître le sort réservé au clone de la bestiole pragoise par notre personnage de maîtresse-femme. Ils sont maintenant tout petits et, pour tout dire, inoffensifs. De plus on trouve auprès de tout bon dépanneur de l'endroit de la crème efficace et des voiles de tulle à se mettre par-dessus la tête pour se protéger des bibittes.

En souvenir de Georgette Pérec, de sa force d'âme, de son regard bleu vosgien et de sa victoire sur le maringouin géant, les générations suivantes ont inventé la journée internationale de la femme. Le 8 mars de tous les ans, on a désormais pour coutume là-bas d'offrir à sa porteuse de brassière d'amour, à sa blonde ou à son agace-pissette préférée une brassée de mignonnes fleurs bleues dont j'ai oublié le nom. Je sais, je n'aurais pas dû. Ce sont peut-être des « Forget-me-not » ? Ca justifierait mon trou de mémoire !

Cette jolie légende aurait pu bien se terminer mais c'était sans compter sur Groscouillu Joliesgosses, le dieu des coupeurs de bois du Canada et des porteurs de pourpoints en tissu écossais et bonnets de castor.
Pour se venger de l'outrecuidance féministe de Georgette et de ses pareilles, pour réparer l'outrage du ravalement de la gent masculine de la région au rang de lopettes indéfendables, Groscouillu Joliesgosses dota les auteures interprètes féminines de ces coins-là d'un organe vocal à faire trembler les épicéas. Cadeau empoisonné ! Du coup on ne comprend même plus, tant elles gueulent, les paroles de leurs bluettes !
Depuis-ce jour, moi-même, je préfère le maringouin de Silène au baragouin de Céline. Comme je dis à mon épouse dans notre vieille automobile : "C'est Dion, tourne le bouton ".

DDS 187 je me souviens


Pour se souvenir davantage encore de Georgette Pérec, « je me souviens » est devenu la devise de cette partie du monde et Mme Marie Travers, dite la Bolduc, a composé et interprété une gaudriole intitulée « Les maringouins ». Si ça vous dit de la turluter avec moi et d'entendre mon ruine-babines à fausses notes, c'est ici !

 

 

P.S. Les lecteurs assidus et les lectrices perspicaces auront deviné qu'il s'agissait ici de « 99 dragons : exercices de style. IX, Lipogramme ».
Ce texte a en effet été écrit sans utiliser les lettres H,K,Q,W,X,Y et Z.
Quoi de neuf ? Pérec !

P.S. La photo de Georgette et Madeleine a été fournie par Joye qui est un peu leur voisine !


 

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