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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
1 septembre 2023

Pas encore tout à fait amnésique. 9, Jouer à chat perché

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Chat alors ! J’ai laissé passer la mi-août sans clamer avec Ray Ventura qu’à cette époque de l’année « c’est tellement plus romantique » !

Avant de déménager vers notre résidence d’automne ou notre palais d’hiver - en fait je ne bouge pas, je ronronne chez moi après mes folles nuits sur le toit - je passerai en revue cette semaine la gent féline, les Raminagrobis de tout poil qui encombrent ma mémoire quasi inutilement puisque, à part mon épouse, je n’ai pas d’animal chez moi. « Je n’ai jamais eu de chat, ou alors y’a longtemps ou y sentait pas bon » (Jacques Brel). C’est parti pour une partie de mistigri !

Puisque nous sommes dans la chanson commençons par là : le père Lustucru, qui est pourtant bonne pâte, n’a toujours pas retrouvé le chat de la mère Michel. C’est dommage parce que c’est peut-être dans la queue de ce chat-là qu’était caché l’esprit cher au médium dans la chanson des Frères Jacques. Henri Salvador, déguisé en matou, n’a toujours pas capturé Minnie la petite souris. Aristide Bruant cherche toujours fortune autour du « Chat noir », cabaret dans lequel j’ai trouvé beaucoup de mes amis. Georges Brassens regrette toujours cette « Putain de toi » qui a posé sur lui sa patte de velours et la jeune bergère Margoton qui dégrafait son corsage pour donner la gougoutte à son chat. Steve Waring, « l’inchantable », n’a pas pu se débarrasser de son matou qui revient dans ses pattes le lendemain matin, même quand on l’expédie en fusée trouver une place idoine à ce fêlé d’Elon.

 

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A côté de celui-là, bien qu’il soit plus célèbre encore, le chat qui disparaît en laissant son sourire en place à Chester, au Cheshire et surtout dans le pays des merveilles d’Alice de Lewis Carroll est d’une discrétion et d’une distinction rares. Il en est d’autres qui la ramènent un peu plus comme le Chat botté ou celui qui est perché sur les contes de Marcel Aymé. Je ne vous embêterai pas avec Parpagnacco, le chat de Venise dû à la plume de Louis Guilloux car personne ne le connaît à part mon vénérable beau-père et moi-même. Il doit bien traîner chez Madame Colette ou M . Léautaud des textes sur leurs nombreux chats.

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Anthropomorphe ou pas, le chat a pris sa place près du radiateur chez le cancre du fond qui préfère aux livres les bandes dessinées. Hercule s’entend tellement comme chat et chien avec son ennemi Pif qu’il arbore en permanence un sparadrap sur son museau jamais placide. Le siamois du capitaine Haddock donne au chien blanc Milou, dans les Sept boules de cristal, l’occasion de créer un mémorable ballet graphique dont Nestor, le majordome, est la malheureuse victime. Le chat de Gaston Lagaffe mène avec la mouette rieuse une autre danse affolante dans les locaux du journal Spirou. Pour des raisons purement idéologiques je connais moins Pat Hibulaire qui officie chez M. Disney. Autour de moi on aime beaucoup « Le Chat du rabbin » mais j’apprécie assez peu le dessin de Johan Sfar et le graphisme des bédés d’après l'an 2000. Félix le chat n’est jamais passé par chez moi, de même que Titi et Sylvestre (Grosminet ?), Garfield, Tom et Jerry mais je les connais et j’ai eu droit aux joyeux délires partouzards du dénommé Fritz the cat de Robert Crumb, surtout au cinéma. On est loin ici, j’imagine, de « L’Espion aux pattes de velours » et des « Aristochats » de l’oncle Walt. Et des vidéos de chatons envoyées sur internet. J'ai aimé aussi les calembours de Siné à propos de l'animal moustachu.

DDS 783 ronald-searle-cat-and-booksRetrouve-t-on un peu de dignité avec le « Duo des chats » de Rossini ? De quoi parle « La Chatte sur un toit brûlant » ? Qui connaît les jolis chats de Ronald Searle qui me séduisirent à Paris lorsque je vins m’y poser à l’âge de vingt ans ? Le groupe de rock-twist des années 60 « Les Chats sauvages » a-t-il laissé un titre impérissable avant de nous faire cadeau de Dick Rivers ? Qui se souvient encore, à Rennes, du café « Le Chat qui pêche » qui se trouvait place Saint-Germain ? Pour toutes ces questions, je donne ma langue au chat ! Mais dans la lignée des chapitres précédents de cette série d’été, on se rappelle très bien la Pomponnette de « La Femme du boulanger » de Pagnol.

Pour terminer, je souscrirai volontiers à l’idée de Jacques Sternberg selon laquelle toute la société a été organisée pour assurer le bonheur des chats qui deviennent ainsi, sans que les humains s’en doutent, les vrais maîtres du monde. Mais moi, je m’en fiche de cette vision-là : tant que ça ne déménage plus que ça dans ma mémoire, tant que mon unique neurone tient la route quand je monte « marouler » (1) sur le toit, tant que je ne « décaroche » (2) pas, comme disait ma grand-mère, je suis le plus heureux des hommes qui jouent le rôle bonnard de l’imbécile de service.

 

(1) en ch’ti (ou en picard) : faire la java, la cour, l’amour en émettant d’inqualifiables miaulements pour les chats grimpés sur un toit

(2) : perdre la tête, devenir fou, tenir des propos incohérents, radoter

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