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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
24 mai 2013

Je ne peux rien vous refuser (Joe Krapov)

- Vous avez reçu un nouveau message ! dit mon ordi.

Je regarde le nom de l’expéditeur ! C’est l’ordi du Défi du samedi qui me dit :
- Dis donc, Joe Krapov, il y a longtemps que tu ne nous as pas gratifiés d’une chronique en 23 lignes !

Comme je n’ai rien à refuser aux ordis – ils me permettent de gagner ma croûte ! – et que je suis un peu maso je me suis exécuté. J’ai tiré.

J’ai tiré mon portrait de « dromomane »car, je l’ai appris cet après-midi chez Madame Wikipe, en plus d’être iatrophobe je suis aussi dromomane ! Comme si bercé trop près du mur ne suffisait pas !

DE JEAN-JACQUES ROUSSEAU ET DE MOI-MÊME

23 lignes pour me transformer en promeneur solitaire et réécrire les Confessions de Jean-Jacques Rousseau en 55 minutes ? Mais on me demande l’impossible, là !

On m’objectera bien sûr que je suis né le même jour que l’amateur de fessées d’Ermenonville. Cependant, du côté de ses artères, il a quand même deux siècles au moins de plus que moi. C’est selon que vous me donnerez vingt-quatre ou quarante-huit ans.

jj rousseau 2

Plus personne n’aime Jean-Jacques Rousseau de nos jours. Chaque fois que Gavroche se casse la gueule par terre, il dit que c’est la faute du philosophe genevois. Jérôme Cahuzac quant à lui reproche à Voltaire d’avoir vendu du saucisson en promotion mais dans ce double dix de chute dans le ruisseau c’est quand même le PS qui glisse sur une andouille, non ? Doit-il revenir à l’Assemblée, le chirurgien capillaire à cause de qui les planqueurs de fric se font des cheveux ? Les avis sont partagés. Il y a 59 millions de gens contre et cinq gars pour. En tout cas, si vous avez le projet de faire des enfants, ne les prénommez pas Jérôme : entre Cahuzac et Kerviel, c’est un prénom qui prédestine à la déchéance. Ou alors faites comme Rousseau, abandonnez-les en chantant du Brel : « Adieu l’Emile, je t’aimais bien, Adieu l’Emile je t’aimais bien, tu sais. C’est dur de mourir au printemps Mais la belle Héloïse m’attend J’espèr’ qu’tu t’trouv’ras une maman ».

(L'image ci-dessus empruntée au talentueux M. Kichka)

Revenons donc à nos promenades solitaires, à mes exercices de botanique et à mes prétendues rêveries hors du monde. Je suis désolé, messieurs Dames mais j’ai beau me moquer à longueur de semaine de Frigide Barjot et Christine Boutin, je ne suis pas pour autant un militant de la cause homo ou autosexuelle. A preuve je viens de célébrer cette semaine un nombre rond d’années de marr(i)age avec une native du bélier ascendant sagittaire. C’est dire si, astrologiquement, je pourrais mettre ma main aux feux de l’amour et parier que je ne suis pas l’ami Zanthrope de Molière et Boby Lapointe.

Simplement, lorsque je marche, j’ai la drôle de démarche du curieux de nature, l’œil de l’observateur et l’esprit du poète-photographe. Cela m’isole des troupeaux de randonneurs-tchatcheurs que l’on croise partout en Bretagne ou sur le chemin de Saint-Jacques à la noix.

Avant que la limite des 23 lignes ne soit atteinte ou dépassée, qu’il me soit permis d’avouer que j’aime, c’est vrai, la coquille, cette brioche du Nord avec deux têtes de Jésus aux extrémités et aussi cet oubli du typographe qui trouve son paroxysme voire son abyme lorsqu’il s’applique au mot « coquille ». Mais je préfère encore marcher dans l’île d’Yeu de La Croix au port de La Meule en ayant laissé tout le monde derrière moi. Eh bien oui, cela, foi de randonneur bien chaussé, c’est vraiment le pied !

A longer la mer bleue sur le petit chemin en haut de la falaise, à se faufiler entre les bosquets d’ajoncs, à surplomber le petit port où les barques sont endormies, à revoir la chapelle Notre-Dame de Bonne Nouvelle étaler sa blancheur dans un décor de Côtes d’Armor – du bleu, du blanc, du vert – à découvrir au loin une créature endormie sur le bord du sentier au-dessus des vagues qui se fracassent dans la crique en contrebas, on se sent comme Adam découvrant Eve dans le journal qu’a tenu l’écrivain Mark Twain de cette rencontre des origines.

Remercions ces braves ancêtres et tant pis si, de votre avis, ni Rousseau ni moi-même ne remplissons le contrat social. Si l’ordre des choses établi exige que l’on détienne un compte Facebook, un Ipad, un Iphone, un abonnement à Canal-Plus-de-chaînes-encore-que-tous-les-autres, le goût de faire la queue dans la nuit froide à l’Apple-store ou sous la pluie pendant trois heures pour une expo au Grand Palais, que l’on ait envie de bastonner les supporters de foot de l’équipe d’en face ou celle de frauder le fisc parce que tout le monde le fait, alors oui, tout comme le Jean-Jacques, je suis un dangereux asocial !

Voilà. Tout est dit et je ne puis que plaindre mes enfants : je ne les ai hélas pas abandonnés et il leur faut, parmi leurs gènes, faire le tri entre les côtés « grand tragique breton » du côté familial maternel et l’héritage « imbécile heureux » de la famille de papa !

Ils feront un tri… sélectif, bien sûr ! Pendant ce temps-là je continuerai de le faire de mon côté – en Suisse, comme
J.-J.- R. – en chantant du Brassens :

« Tout est bon chez elle, y’a rien à jeter
Sur l’île déserte il faut tout emporter ».

 

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