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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
14 novembre 2014

CHAMAN BOUCHE UN COIN !

Personne n’a jamais courtaudé le Malin mais tout le monde tire le diable par la queue. C’est sans doute que ventre affamé n’a pas d’oreille. La faim justifie que les moyens aillent se vendre tandis que les grands se gobergent. Ce que les petits gagnent, n’en parlons pas. Pourquoi les appellerait-on gagne-petit, sinon ? Tout ça pour dire qu’à cette époque plutôt opaque et peu épique je faisais le vigile dans un supermarché. Hé, quoi, il faut bien vivre ! S’il n’était de mâchicoulis, que ferait la colichemarde ? Que les péronnelles mutissent, peu me chaut : du début à la fin de mois, je croûte. Crise !

Tout était calme ce matin-là. J’ouvrais un oeil numillitique et surveillais les caisses et les têtes de gondoles pas assez vénitiennes à mon goût quand la cliente chic est entrée. Choc !

Elle avait le type asiatique, était coiffée d’une drôle de toque. Elle n’avait ni balantine, ni sacvuittone, ne poussait nul Caddie ®. Elle semblait un cadeau, ça semblait du gâteau, un carton. Trop facile, trop gracile, trop belle pour être honnête ! Claudiquant, Cafougnettesque, Roubaisien, je la pris en filature, j’emboîtai le pas à sa mise.

Je la filai à provisions car, c’est peu de le dire, elle avait avantages à foison. Elle avait beau être toute seule il y avait déjà bien du monde au balcon. Tout en lui filant le train, je surveillais ses arrières en même temps que César Franques mais elles n’étaient alors que Gauloises et partirent enfumées. N’allez pas pour autant faire de moi une freloche car plutôt que par les siennes, à Madame Bellepaire, j’avais été séduit par son allure fière et bien intrigué je le jure par cela qu’elle jurait et semblait intrigante. Oui, professionnellement j’aime que l’on me hameçonne, que Madame me sonne pour que je la soupçonne. J’adore savoir ce qui se trame et suis pour cela capable de suivre le fil d’une histoire jusqu’à son travoul même ! Et voilà le travoul, m’exclamé-je souvent quand la cliente un peu dinde vite son sac de New Delhi pour dévoiler le corps dudit. Délicieux délit, adorable larcin pour Larsan, chambre jaune, dame en noir, détective au parfum, rapine qui n’alla pas plus loin qu’aux arpents du magasin.

Mais là, bizarrement, non. Pas de poches à sa levantine, pas d’emplettes, pas d’embrouilles, pas même de farfouille au rayon des chaussettes. Pas même l’air d’être en repérage, la perruche. Je commençai à me dire que je faisais fausse route, allais vers la déroute, pédalais dans la yourte ou même dans la choucroute. J’allais m’en retourner à mon poste de guet pas gai quand la fille aux yeux bridés, aux pommettes mongoloïdes et à la toque toquée pivota sur elle-même et me dit :

- Cessez de me suivre ou j’appelle un agent !
- Allez-y, je suis là, répondis-je en exhibant mon badge.
- Eh bien quoi ? me fit-elle. Vous avez un problème ?
- Vous… Vous m’attirez ! bredouillai-je. Vous scintillez comme une étoile, vous allez sans bile comme une comète. Oh ma chourie, chourie ! Voulez-vous Philéa l’anglaise avec moi ?

Elle haussa les épaules, me traita de vermisseau et s’en fut tandis que, Fu Manchu déconfit et confus, je regagnais mon poste de vigile près des caisses.

Cinq minutes plus tard je la revis qui faisait sagement la queue pour payer son achat. Ca ne manquait pas de sel : elle avait acheté un puchoir, la Messaline des steppes de l’Asie centrale. J’avais juste oublié que quelquefois le cow-boy Marlboro dîne. Elle ramassa sa monnaie et sortit, me jetant au passage un dernier regard méprisant : « Un coup de dédain jamais n’anoblira le bazar » a dit le poète.

Je la suivis des yeux. Elle traversa la rue, s’arrêta sur le trottoir d’en face, se retourna et regarda le magasin. Elle répandit le sel en cercle autour d’elle. Elle posa le bout de ses doigts écartés les uns des autres de chaque côté de sa tête, contre ses tempes, elle ferma les yeux et se concentra.

D’abord il ne se passa rien. Puis petit à petit un brouhaha sembla s’élever depuis le fond du magasin. Délaissant ma sorcière bien aimée, bien haineuse voire vénéneuse, je me tournai vers le foyer d’agitation. Les clients s’étaient tous immobilisés, surpris par le phénomène. Au début c’est venu depuis le rayons chips et puis ont suivi les gâteaux apéros et les friandises en sachets. Les paquets se sont gonflés d’air, émettant une série de bruits secs mais restant rebondis à la limite de l’éclatement. Puis un premier paquet s’est élevé dans les airs entraînant les autres à sa suite. Lentement ils se sont approchés des caisses, sont restés suspendus à trois mètres de hauteur et ont attendu là tandis qu’ici et là, tous les autres articles du magasin, dryades, acétabules, vol-au-vent, boîtes de conserves de concert gagnaient l’oblast des monts célestes. Bientôt les surgelés entrèrent dans la danse et gagnèrent l’Altaï. A la fin le magasin ne fut plus qu’un désert de Gobi sans plus rien à gober pas même le boulgour et clients, caissières et vigiles sidérés assistèrent à ce vol à flanquer le bourdon. A quoi ça rime si le Nesquik hisse l’écorce à Coffe (J.-P.) ?

Enfin tout le fourbi, rangé en file indienne se mit à zonzonner par-dessus les portiques antivol qui n’avaient jamais si mal porté leur nom que ce jour-là. Les premières marchandises s’engouffrèrent dans la porte à tambour qui devint un manège plus coloré encore qu’un medley de chansons de Walt Disney. Dehors, stupéfiés, les passants du Centre commercial regardaient hébétés la boutique se vider sous les yeux du videur qui bientôt le serait lui aussi, vidé, de la boîte.

Le patron sortit de son bureau et, comme si je n’étais qu’un costume, m’alpagua :

- Mamadou Lambatar ! Qu’est-ce que c’est que ce foutoir ?
- C’est un hold-up, patron ! Un casse de haut vol !
- Qui a fait ça ? Et pourquoi personne n’a prévenu la police encore ?

Je regardai dehors. Avec toutes les marchandises à sa suite, la Mongole fière s’était envolée !

DDS 324 Mongolfière

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7 novembre 2014

FAIRE SON CIRQUE

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 Dans mon costume de couleur
J'attends qu'ait fini l'écuyère
Pour m'élancer dans la lumière,
Dans le cercle du projecteur.

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Voilà qu'on lance la musique
Et que déboule Triboulet.
Le clown travaille sans filet
Son numéro tragi-comique.

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Le défilé des éléphants,
Une fois qu'ont barri leurs trompes
N'est rien à côté de ses pompes
Qui font bien rire les enfants.

 

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 Nez rouge, cheveux en bataille, 
Visage blanc, sourcils charbon,
Il cabriole, il fait des bonds,
Il se fait courser, il se taille

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Puis il grimpe sur une échelle,
Annonce qu'il va s'envoler.
Tout un chacun de rigoler
Mais soudain, scène exceptionnelle,

Joe Krapov pour timbre

Il devient la femme canon,
Il traverse le pavillon
Et se transforme en papillon !
Quel magicien, crénom de nom !

***

Oui, la prestation est truquée !
Il y a forcément un complice
Malle, rideau, autre artifice,
Substitution alambiquée.

Afin de lever le mystère
Visitez la ménagerie,
Découvrez la supercherie :
Une cage à lépidoptères !

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31 octobre 2014

Confondu en remerciements (Joe Krapov)

Je me suis confondu en remerciements :
J’ai dit « Merci Tintin » au capitaine Haddock !
J’ai dit Deo gratias dans un congrès d’athées !
J’ai chanté « Merci patron » de Pierre Perret et « Les jolies colonies de vacances merci papa merci maman tous les ans on voudrait qu’ça r’commence » des Charlots !
J’ai dit « Merci Garrett » alors que ce n’était pas Pat mais bien Billy the Kid !
J’ai lu « Merci pour ce moment » de Claude Chabrol au lieu de regarder « Merci pour le chocolat » de Valérie T. si je mens.

Après toutes ces gaffes je me suis fait un sang danke mais pas longtemps car après je me suis perdu en conjectures : Etais-je pris de boisson ? Confit en dévotion ? Entré en déliques-adoles-cence ?


Ce qui a mis un terme à mes tergiversations c’est que l’armoire normande – mais n’était-ce pas en fait un placard breton ?– m’est tombé sur le buffet. SPLATCH !


Alors auprès de tous ceux que j’avais mal remerciés et auprès de tous les autres à qui je n’avais pas dit merci je me suis excusé. Platement.

 

12 septembre 2014

Un drôle d'oiseau (Joe Krapov)

S’il y a bien sur cette terre un animal aux us et coutumes étranges, c’est l’Homme.
Oui, je sais, la Femme n’est pas mal non plus.
Bien que j’aie mis une majuscule à Homme, mettons-les, l’homme et la femme, dans le même panier et gageons qu’ils y feront des petits ensemble.
Reprenons.
Disons « nous »…
Disons-nous que nous allons dire « nous » par la suite puisque l’objectif de ce texte est de mettre tout le monde, y compris moi-même, dans le même sac même pas à malices.

Nous allons donc tous à l’école. On nous y apprend à lire, à écrire, à compter pour autre chose que du beurre, on nous enseigne l’histoire, la philosophie, les langues, la littérature et on nous donne en exemples des gens qui ont pensé et passé leur vie à pondre des bouquins d’importance : on est très honorés d’apprendre que Balzac est l’auteur de 93 volumes de Comédie humaine, on découvre qu’Emile a pondu vingt volumes de Rougon-Macquart ou dans ces eaux-là, on s’étonne que Marcel Proust… Non, pas Marcel Proust, oncle Walrus va encore faire une jaunisse !

Résultat des courses, une fois apprise la leçon, on est un homme, mon fils ! Une fois ingurgités les codes moraux et culturels de la société contemporaine, munis de ce bagage exemplaire et admirable des gens qui, face à la barbarie primitive, ont conquis la liberté de penser, de raisonner, d’écrire, de partager, de dénoncer, de délirer même parfois alors, irrémédiablement, comme tout le monde,… nous nous affalons devant un écran et nous regardons des conneries !

Les plus évolués d’entre nous, ceux qui ne se laissent pas prendre au piège des glandes mammaires de la Miss Météo du moment, celles qui trouvent stupide de s’exciter une bière à la main devant vingt deux crétins sportifs qui courent après une baballe, celles et ceux que laissent indifférent(e)s les millions de photos de chatons qui font tout et n’importent quoi et surtout gangrènent l’Internet, ceux-là et celles-là qui ont retenu quelque chose du bel enseignement de l’école continuent à écrire et y prennent grand plaisir. Grâces leur soient rendues : ils, vous, toi, moi, participent à des ateliers d’écriture et à mon bonheur présent et je les vous te me en remercie.

MAIS !

Mais comment expliquer qu’au sein de cette communauté résistante de gens sensés un type puisse arriver et imposer sa loi stupide sans que personne ne moufte plus que ça ? Avant que cette chronique n’atteigne sa 23e ligne ou ne la dépasse, nommons le type M. Twitter ou appelons-le M. Loiseau et rendons-nous à l’essentiel car ça traînouille un peu, je trouve, ce jour d’oui mais des Panzani !

M. Loiseau nous dit : « C’est très bien les gars les filles ! Vous avez commencé à raconter votre vie sur un blog ! Vous savez intéresser lecteurs et lectrices de manière à ce qu’ils vous suivent dans vos récits du quotidien au moins jusqu’à la 23e ligne ! Mais maintenant, avec moi, vous allez faire plus fort ! Vous allez ouvrir un compte chez moi, comme ça je saurai tout de vous, j’envahirai vos boîtes mail avec ma pub mais ça c’est rien. Surtout vous allez avoir des tas de fans de vous, des « followers » à qui vous raconterez où vous êtes, ce que vous faîtes, qui vous êtes, ce qui vous plaîtes ou vous déplaîtes, vos histoires de zézettes ou de pensées pas nettes… Tout ça, vous allez le faire à longueur de journée chez moi. MAIS ! Mais chacun de vos message ne devra pas dépasser 140 caractères d’imprimerie !".

Le croirez-vous ? Chez cet individu aux mœurs bizarres autant qu’étranges, l’homme, la femme, nos « contemporains c’est dire si j’contemple rien », cette proposition stupide a marché et marche encore. Tu demandes aux gens de se contenter de cinquante mots de vocabulaire, de consulter leur courrier sur une plaquette en plastoque de 5cm sur 10, de n’exprimer qu’une phrase à la fois pour que la toute faune cacophone et ils le font ! Ils écoutent leur discothèque dans deux boules quiès maintenant ! Moi je dis que ça mérite des baffles !

Ce besoin panurgien de suivre le troupeau et les nouveaux gourous armés de la technologie est tel que j’ai moi-même ouvert un compte Twitter il y a deux ou trois ans. A ma décharge publique, je n’y ai publié que six ou sept haïkus et c’est tout. Comme je suis un individu aux us et coutumes encore plus étranges que les vôtres, un drôle d’oiseau en fait, je me suis aperçu qu’au lieu de cuicuitweeter j’allais faire (le) coucou chez les autres et que je déposais, dans la zone de commentaires de mes blogami(e)s, de véritables formulettes à -140 ! Je les ai baptisés gazouillidiots parce qu’au début j’écrivais cela « twits ». Joye m’a expliqué que ça voulait dire quelque chose comme « crétin » en anglais.

Et donc ce jour, ayant décidé de rentrer dans le rang – c’est là le lot commun des brebis égarées du troupeau du Seigneur ! - je les rassemble ici pour que vous puissiez juger par vous-même qu’en matière de bêtise et de méchanceté, face à Nadine M. et Valérie T., j’ai encore des progrès à faire ! Ou pas !

La vie est dégueulasse. John Lennon est mort. Georges Brassens est mort. Jean Ferrat et Georges Moustaki sont morts. Et Michel Sardou chante encore !

Le temps d’apprendre à vivre, il est déjà trop tard. Bien ! Alors vivons vite! On apprendra plus tard !

Qu’Elsa crie « Olé Olé ! » Et aussitôt Aragon grimpe aux rideaux !

Aller au cinéma voir « Le Jour le plus long », « la 25e heure » ou « L’année des méduses », ça prend du temps !

Chez nous on ne nettoie le lustre que tous les cinq ans

On a conservé « les riches heures du duc de Berry » mais pas « les laborieuses journées du pauvre Martin, serf ».

- Qu’as-tu fait de tout ton temps sur cette terre ? demanda Dieu à Dostoïevski.
- « L’Idiot » …
Mais avant même qu’il eût pu citer d’autres titres, Dieu se tourna vers moi et demanda :
- Et toi, Joe Krapov ?
- -Pareil !


Tu vas pas nous chier une pendule parce que t’as perdu ta montre, non ?

Les déchus du Sarkozysme ne seront pas tombés de bien haut (C’est petit, ça, Joe Krapov !)

Si j’étais un bouquet de fleurs, j’aimerais bien être six roses, ma foi !

Si j’étais une fleur, je serais jacinthe ni touche !

Proverbe chinois : Un potage au nid d’hirondelles ne fait pas le rouleau de printemps !

Les chiens de Vannes aboient et la carapace

Parce qu’ils ont bonne mémoire et commettent rarement des erreurs les éléphants n’aiment pas qu’on les détrompe.

Je ne sais jamais si le concerto de Rodrigo est d’Aranjuez ou s’il est du silence qui suit l’exécution d’une œuvre de Mozart !

C'est quoi le risque professionnel majeur pour un photographe qui n'aurait pas de trépied et photographierait un même port belge sous le même angle à différentes heures de la journée ?
Attraper une Ostendinite !

Un commentateur c'est quelqu'un qui commentâte de la critique littéraire mais qui est bien embêtâté quand ce n'est pas de la fiction !

Comme ces gazouillidiots sont en général suivis d’un « OK je sors », estimant avoir assez « twité»sur le Défi du samedi pour aujourd’hui, je m’en vais effectivement sortir et retourner dans la vraie vie. J’y ai là aussi des us et coutumes très étranges : je m’y fiche pas mal de Twitter et de la marche du monde, j’y aime des gens, j’y photographie des lieux et j’y joue et chante sur une guitare à douze cordes, avec la voix de Guy Béart, des chansons de Georges Brassens !

 

5 septembre 2014

La douane des souvenirs du Bassin d'Arcachon (Joe Krapov)

 

J'ai rapporté dans ma valise
Un peu de la lumière grise
Qui baignait le port de Parros
Où l'on ne roule pas carrosse
Mais où, bien à l'abri des tuiles
On dit que tout baigne dans l'huile

Je vous offre quelques bricoles
Venues des ports ostréicoles :
Des hippocampes, des pinasses.
Près de Notre-Dame des passes
Des prix qui sont loin d'être en baisse
M'ont laissé tout nu à la caisse.

Dans le fond de ma Samsonite
J'ai déposé pour ma pituite
L'étiquette et quelques bouchons
De vins du bassin d'Arcachon
Et d'une ou deux autres potions
Auxquelles je fis dévotion

Dans un' poch' de mon sac à dos
J'ai mis la ville de Bordeaux,
Les grands chevaux de sa fontaine,
Montaigne le croquemitaine,
Deux têtes coupées, médusées
Et le Picasso du musée.

J'n'ai pas déclaré à la douane,
De peur qu'on me mette en cabane,
Le grand pyjama à rayures
Qu'à Biganos, port d'envergure,
j'ai volé avec la manière
Et planqué dans l'fond d'ma glacière

J'ai glissé dans mon réticule
Le pénis amputé d'Hercule
Qu'un iconoclaste nocturne,
Sorti cagoulé de sa turne,
Fit tomber d'un coup de massue
Au sein de la cité cossue.

J'n'ai rien pris d'autre au Parc mauresque
Bien qu'je sois kleptomane ou presque
Et j'ai même oublié, crétin
De m'acheter un sacristain,
Pâtisserie comblant les creux
De tout voyageur religieux.

On trouvera dans mon baise-en-ville
- Oh Sympathy for the devil ! -
La pierre qui roule sa bosse
Sur la route de Biscarosse
Et la dune qui m'ensabla
Quand j'escaladai le Pilat.

J'ai ramené dans mon bagage
Une impression de fort tangage
(Les bas ? Les hauts du cap-Ferret
Qui ne m'ont pas fait trop marrer ?),
De séjour teinté d'hérésie
Au pays de Grand'bourgeoisie.

J'ai ramené dans ma besace
Une magnifique rosace
Prise au bout de la jetée Thiers
Dans le plancher devant la mer,
Rose des vents de la Gironde
Qui invite à rêver le monde.

Et j'ai mis dans mon havresac
Le clapotis et le ressac
De la mer immortalisée,
De la mariée irisée
Dont le voile volait dans l'air
Un soir sur la plage Pereire.

Dans la grande malle d'osier
J'ai mis le soleil, ce brasier
Qui incendia nos soirs d'été
Et dispensa sérénité
Aux marcheurs rêvant d'aventure
En pays de villégiature

Mais je mens comme je respire :
Dans ma besace du bas-Empire
N'étaient que batteries vidées,
Saturations de cartes SD,
Livres lus, chaussettes salies,
(Et billets de mono poli ?)

Car dans mon vieux sac à malices
Chacun sait quels sont les délices
Que je rapporte des voyages :
Des palanquées "tchanquées" d'images !
Faites en votre miel ou pas :
Je butinerai jusqu'au trépas !

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27 août 2014

Le Domaine de Chatterley ? (Joe Krapov)

DDS 313 paysage de début

- C’est mâtines de Pâques, ma douce primevère !
- Il suffit !
- Les cloches sonnent de bonheur ! Din ! Ding ! Dong !
- Il suffit !
- Courons, légers comme cabris, faisons des bonds ensemble et des gambades en l’honneur de la nature, de Dieu…
- Il suffit !
- Laisse-moi jouer guilleret l’aubade à la mousse, à l’herbe, au coquelicot, au royaume de la tarentelle… Laisse-moi croire que tu préfères le berger qui souffre sans le dire au sonneur en velours et dentelles…
- Il suffit !
- Coucou, fais le guet ! A cueille-fleurettes je t’emmène visiter le danger et l’enfer ! C’est péché de cacher ton dedans ! Rien n’est mieux pour s’aimer que blottis sans galoches ni sabots avec elle que, entre tou’s les belles, je saurai tant tenir comme pique, chardon ménager pied voici ton tout passer patte pendant personne devine jetons dents semble ton tes ton tes tes ton petits fleuris tenir tenir tenir vois tout tout Bon !
- Il suffit !

Devant l’incohérence du discours et l’impudence des gestes de l’homme au souffle court, la châtelaine s’échappe. Elle franchit la passerelle en courant.

Il la regarde fuir vers le château au loin et, ressentant au plus profond de sa chair un sentiment d’échec lié à leur différence de classe sociale il se tourne vers Dieu et lui demande de faire disparaître cet épisode de sa biographie, voire même, s’Il le peut, à la faveur d’une révolution à venir, de faire en sorte que ces murs roses et ces tourelles pointues disparaissent de la surface de la planète.

Alors, le miracle se produit. Dieu apparaît entre deux nuages dans le ciel, il passe un coup d’éponge et repeint un autre paysage par-dessus Sa création.

DDS 313 paysage de fin

- Seigneur ! Qu’as-tu fait là ? demande la châtelaine avant de disparaître dans un autre espace-temps où les bergers Fragonardiens n’ont plus rien de libidineux.
- Ben quoi ? Tu ne connais pas la chanson ? Il supplie d’effacer le fond, c’est tout de suite la peinture ! 

14 août 2014

FERME TA BOÎTE ! (Joe Krapov)

Sur la petite place de ce petit village il n’y avait personne. Et pourtant je n’avais pas rêvé. Une petite voix m’avait interpellé et elle continuait de me parler.

Boîte aux lettres MAP DDS 311

- … Et c’est vrai que maintenant il n’y a plus besoin d’entrer dans une cabine téléphonique pour appeler du dehors le 22 à Asnières ? C’est ça que ça veut dire tous ces gens qui se promènent en se tenant l’oreille droite et qui causent tout fort dans la rue comme des débiles sans plus rien regarder autour d’eux ? Au début j’avais cru à une recrudescence d’idiotisme de village cumulée avec une épidémie d’oreillons ! Et les courriels, c’est quoi exactement ? Vous tapez un message sur votre clavier, vous tapez « envoi » et il arrive instantanément dans la boîte de votre destinataire ? On est en pleine science-fiction, là ! Comment ça fonctionne ? C’est un facteur factice sur un vélo virtuel qui pédale pour faire passer le pli dans les tuyaux ? Vous n’écrivez vraiment plus sur du papier ? On m’a même dit qu’aux Etats-Unis ils allaient arrêter d’apprendre aux mômes à écrire avec un stylo ! Vous vous rendez compte ? Qu’est-ce qu’on va devenir, nous ? Des pièces de musée ? Déjà qu’il n’y a plus qu’une levée par jour ! Et vous, vous écrivez encore ? Vous avez envoyé des cartes postales cet été ?".

C’était bien de la boîte aux lettres archaïque que la voix sortait. C’était bien la boîte elle-même qui me questionnait. Je n’ai pas eu le cœur de lui parler de Skype, de Facebook, de Twitter, des SMS ni de la blogosphère où je suis très actif.

Et puis j’ai paniqué. Jeanne d’Arc aussi a commencé par entendre des voix et puis après son destin a basculé tragiquement parce qu’elle est allée bûcher dans un autre domaine que le sien. Alors j’ai eu pitié de la boîte aux lettres jaune et verte et j’ai fait un truc idiot. Dans la fente réservée aux lettres et aux cartes j’ai glissé mon baladeur MP3. Si elle farfouille un peu dedans elle y trouvera, avec les petites merveilles d’Emmylou Harris ou de Cécile Corbel, la carte postale virtuelle et sonore de mes vacances à A…
 

4 juillet 2014

Céleste est mal barrée ! (Joe Krapov)

(E-specially dedicated to my dear uncle Walrus)

Quand il commençait à se battre avec son oreiller, à constater qu’il s’était mis au lit trop tôt, à décortiquer les phases de son endormissement et ses impressions de rêve éveillé ou pas, elle arrivait pour le soutenir, pour l’abrutir, l’embrouiller, l’embrumer mais elle faisait pis que tout car malgré son homosexualité, elle voyait bien qu’il ne voulait pas se laisser aller dans les bras de Morphée et c’est donc elle qui, hachée de points-virgules, souillée de subjonctifs plus que parfaits mais fortement chargés en miasmes et en chiasmes, étirée jusqu'à plus soif en vue de perturber la compréhension du lecteur éventuel, récupérait les symptômes de l’écrivain asthmatique et se trouvait comme aspirée dans le tourbillon de la douche mémorielle projetée à jet continu sur les parois du souvenir et la nostalgie crasse se détachait par bribes, l’encalminait au point que tout un univers de jeunes filles en fleurs, de barons, de causeurs, d’aristocrates, de salonnards et de gloseurs, avec un art certain de ventiler le snobisme et la pseudo-modernité au sein d’un classicisme verbeux et pédantesque l’envahissait, lui donnait le tournis, lui faisait oublier sa justification première, à savoir la joie de communiquer simplement une idée, une émotion, une douleur, une banalité, un échange de politesses, du genre « Si le nez de Cléopâtre avait été plus long on n'en s'rait pas là !», « Tiens tiens tiens c’est le printemps qui vient !» « Et l’on dit merde en se pinçant les doigts », « Tout va très bien madame la marquise », «Vous permettez que j’déballe mes outils ? Oui mais faites vite qu’on lui a dit» et c’en était au point qu’elle avait des velléités grossières de soulager son maître, son auteur, de lui suggérer les mêmes pratiques physiques que celles qu’il faisait subir à l’intellect patient de ses lecteurs intellectuels et elle riait sous cape en imaginant que le petit Marcel eût pu, plutôt que de perdre son temps à s’agiter les neurones dans le noir, étrangler frénétiquement le borgne, recourir à la veuve Poignet, dessiner dans ses draps fins une carte de France animée sur laquelle le hasard lui eût fait disposer, d’un jet ou de plusieurs, Jouy-en-Josas, Gif-sur-Yvette, Bourg-la-Reine et Tremblay-les-Gonzesses dans un même alignement géographique surréaliste mais elle savait bien que chez ces gens-là, monsieur, ça ne se fait pas et que cet humour de garçon boucher ou de troisième mi-temps de match de rugby qu’elle tenait de son mari chauffeur de taxi, s’il avait eu sur l’insomniaque l’effet d’endormissement béat souhaité, n’eût pas été goûté de la postérité admirative pour qui elle-même, tirant à la ligne, usant de ficelles grosses comme celles qui soutiennent au-dessus de la rue populeuse le funambule somnambule, faisait tout son cirque ce soir, bien qu’elle ne fût qu’une modeste servante dévouée à l’accomplissement de l’œuvre majeur, se fatiguant au bout du compte de ce qu’on pût passer ainsi sa vie à causer, gloser, dégoiser sur un monde si étriqué alors que l’on sortait d’une énorme boucherie, 14-18 qui eût dû logiquement faire agir, réagir et lutter contre le même système qui avait permis cela, et rêvant du moment où, à la phrase alambiquée, tortueuse et finalement très amusante qu’elle était, Marcel, malgré qu’il en ait, consentirait à mettre un terme en posant, à l’issue d’une dernière aspiration d’air frais à la fenêtre ou au terme d’une énième relecture, son stylo et un point final qui lui eût permis à elle-même, pauvre phrase céleste égarée dans un océan de papier prétentieux comme une humble prolétaire ne comptant que pour beurre dans un magma de sept milliards d’individus, de se terminer à sa façon, ou plutôt à celle de Charles Trénet qui chantait que « Les jours de repassage, Dans la maison qui dort, La bonne n'est pas sage Mais on la garde encore : On l'a trouvée hier soir, Derrière la porte de bois, Avec une passoire Se donnant de la joie".

DDS305 Céleste Albaret

Céleste Albaret par Jean Claude Fourneau (1957)

27 juin 2014

Légende urbaine de la campagne et java bleue avec chapeaux (Joe Krapov)

Edinburgh, le 24 juin 2014, de notre envoyé spécial :

DDS 304 Monstre du lac

Un drame affreux a failli se dérouler tout au fond du Loch Ness où une équipe de scientifiques de l’Université de Rennes 3 opérait des recherches autour du soi-disant « monstre » qui sévirait ou aurait sévi par ici.

Deux hommes-grenouilles se sont en effet violemment querellés en cours de mission sous-marine. D’après les premiers éléments recueillis auprès du commissariat de Drumnadrochit il s’agirait – Ah, ces Froggies ! - d’une rivalité amoureuse qui aurait pu très mal tourner si le professeur Denis D'Eglise-Trouée, responsable de l’expédition, n’avait pas fait appel à la brigade internautique locale commandée par Mlle Imogène Mc Carthery.

Nos agents ont fourré les deux Frenchies au bloc au motif d’envoi de pêches en eau trouble. On peut donc affirmer sans aucune Nessie-tation que le « monstre du lac » court toujours mais que l’aura négative qu’il projette sur notre pays a encore fait des victimes.

Il n’y aurait pas là de quoi en faire tout un plat si quelques membres facétieux de cette université de Rennes 3 n’avaient tiré de cet incident une chanson qui tourne sur les campus et fait un carton (-pâte) monstre sur Youtube. 

N.B. "La Java des hommes-grenouilles" est une oeuvre du formidable Ricet Barrier.

13 juin 2014

Hallucination auditive (Joe Krapov)

J'hallucine ou quoi ? Je le croate pas, ça !!!

Voilà que je chante en serbo-croate ? en bosniaque ?  en yougoslave !

Et ces bâtiments aux formes bizarres qui m'entourent ? Où suis-je ? 

Qu'est-ce qu'on a renversé sur ma moquette ? Au secours, j'hallucine !

 

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Le cahier de brouillon de Joe Krapov
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